Édit de Nantes
en faveur de ceux de la religion prétendue réformée
HENRY par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre A tous présents
et à venir.
Salut.
Entre les grâces infinies qu'il a plu à Dieu nous départir,
celle est bien des plus insignes et remarquables de nous avoir donné
la vertu et la force de ne céder aux effroyables troubles, confusions
et désordres qui se trouvèrent à notre avènement
à ce royaume, qui était divisé en tant de parts et
de factions que la plus légitime en était quasi la moindre,
et de nous être néanmoins tellement roidis contre cette tourmente
que nous l'ayons enfin surmontée et touchions maintenant le port
de salut et repos de cet État. De quoi à lui seul en soit
la gloire tout entière et à nous la grâce et l'obligation
qu'il se soit voulu servir de notre labeur pour parfaire ce bon œuvre.
Auquel il a été visible à tous si nous avons porté
ce qui était non seulement de notre devoir et pouvoir, mais quelque
chose de plus qui n'eût peut-être pas été en
autre temps bien convenable à la dignité que nous tenons,
que nous n' avons plus eu crainte d'y exposer puisque nous y avons tant
de fois et si librement exposé notre propre vie.
Et en cette grande concurrence de si grandes et périlleuses affaires
ne se pouvant toutes composer tout à la fois et en même temps,
il nous a fallu tenir cet ordre d'entreprendre premièrement celles
qui ne se pouvaient terminer que par la force et plutôt remettre
et suspendre pour quelque temps les autres qui se devaient et pouvaient
traiter par la raison et la justice, comme les différends généraux
d'entre nos bons sujets et les maux particuliers des plus saines parties
de l'État que nous estimions pouvoir bien plus aisément
guérir, après en avoir ôté la cause principale
qui était en la continuation de la guerre civile. En quoi nous
étant, par la grâce de Dieu, bien et heureusement succédé,
et les armes et hostilités étant du tout cessées
en tout le dedans du royaume, nous espérons qu'il nous succédera
aussi bien aux autres affaires qui restent à y composer et que,
par ce moyen, nous parviendrons à l'établissement d'une
bonne paix et tranquille repos qui a toujours été le but
de tous nos vœux et intentions et le prix que nous désirons
de tant de peines et travaux auxquels nous avons passé ce cours
de notre âge.
Entre les affaires auxquelles il a fallu donner patience et l'une des
principales ont été les plaintes que nous avons reçues
de plusieurs de nos provinces et villes catholiques de ce que l'exercice
de la religion catholique n'était pas universellement rétabli
comme il est porté par les édits ci-devant faits pour la
pacification des troubles à l'occasion de la religion. Comme aussi
les supplications et remontrances qui nous ont été faites
par nos sujets de la religion prétendue réformée,
tant sur l'inexécution de ce qui leur est accordé par ces
édits que sur ce qu'ils désireraient y être ajouté
pour l'exercice de leur dite religion, la liberté de leurs consciences,
et la sûreté de leurs personnes et fortunes, présumant
avoir juste sujet d'en avoir nouvelles et plus grandes appréhensions
à cause de ces derniers troubles et mouvements dont le principal
prétexte et fondement a été sur leur ruine. A quoi,
pour ne nous charger de trop d' affaires tout à la fois, et aussi
que la fureur des armes ne compatisse point à l'établissement
des lois, pour bonnes qu'elles puissent être, nous avons toujours
différé de temps en temps de pourvoir. Mais maintenant qu'il
plaît à Dieu commencer à nous faire jouir de quelque
meilleur repos, nous avons estimé ne le pouvoir mieux employer
qu'à vaquer à ce qui peut concerner la gloire de son saint
nom et service et à pourvoir qu'il puisse être adoré
et prié par tous nos sujets et s' il ne lui a plu permettre que
ce soit pour encore en une même forme et religion, que ce soit au
moins d'une même intention et avec telle règle qu'il n'y
ait point pour cela de trouble et de tumulte entre eux, et que nous et
ce royaume puissions toujours mériter et conserver le titre glorieux
de Très chrétiens qui a été par tant de mérites
et dès si longtemps acquis, et par même moyen ôter
la cause du mal et troubles qui peut advenir sur le fait de la religion
qui est toujours le plus glissant et pénétrant de tous les
autres.
Pour cette occasion, ayant reconnu cette affaire de très grande
importance et digne de très bonne considération, après
avoir repris les cahiers des plaintes de nos sujets catholiques, ayant
aussi permis à nos sujets de la religion prétendue réformée
de s'assembler par députés pour dresser les leurs et mettre
ensemble toutes leurs remontrances et, sur ce fait, conféré
avec eux par diverses fois, et revu les édits précédents,
nous avons jugé nécessaire de donner maintenant sur le tout
à tous nos sujets une loi générale, claire, nette
et absolue, par laquelle ils soient réglés sur tous les
différends qui sont ci-devant sur ce survenus entre eux, et y pourront
encore survenir ci-après, et dont les uns et les autres aient sujet
de se contenter, selon que la qualité du temps le peut porter.
N'étant pour notre regard entrés en cette délibération
que pour le seul zèle que nous avons au service de Dieu et qu'il
se puisse dorénavant faire et rendre par tous nos dits sujets et
établir entr'eux une bonne et perdurable paix.
Sur quoi nous implorons et attendons de sa divine bonté la même
protection et faveur qu'il a toujours visiblement départie à
ce royaume, depuis sa naissance et pendant tout ce long âge qu'il
a atteint et qu'elle fasse la grâce à nos dits sujets de
bien comprendre qu'en l'observation de cette notre ordonnance consiste,
après ce qui est de leur devoir envers Dieu et envers nous, le
principal fondement de leur union et concorde, tranquillité et
repos, et du rétablissement de tout cet État en sa première
splendeur, opulence et force. Comme de notre part nous promettons de la
faire exactement observer sans souffrir qu'il y soit aucunement contrevenu.
Pour ces causes, ayant avec l'avis des princes de notre sang, autres
princes et officiers de la Couronne et autres grands et notables personnages
de notre Conseil d'État étant près de nous, bien
et diligemment pesé et considéré toute cette affaire,
avons, par cet Édit perpétuel et irrévocable, dit,
déclaré et ordonné, disons, déclarons et ordonnons
:
I.
Premièrement, que la mémoire de toutes choses passées
d'une part et d'autre, depuis le commencement du mois de mars 1585 jusqu'à
notre avènement à la couronne et durant les autres troubles
précédents et à leur occasion, demeurera éteinte
et assoupie, comme de chose non advenue. Et ne sera loisible ni permis
à nos procureurs généraux, ni autres personnes quelconques,
publiques ni privées, en quelque temps, ni pour quelque occasion
que ce soit, en faire mention, procès ou poursuite en aucunes cours
ou juridictions que ce soit.
II.
Défendons à tous nos sujets, de quelque état et
qualité qu'ils soient, d'en renouveler la mémoire, s'attaquer,
ressentir, injurier, ni provoquer l'un l'autre par reproche de ce qui
s'est passé, pour quelque cause et prétexte que ce soit,
en disputer, contester, quereller ni s'outrager ou s'offenser de fait
ou de parole, mais se contenir et vivre paisiblement ensemble comme frères,
amis et concitoyens, sur peine aux contrevenants d'être punis comme
infracteurs de paix et perturbateurs du repos public.
III.
Ordonnons que la religion catholique, apostolique et romaine sera remise
et rétablie en tous les lieux et endroits de cestui notre royaume
et pays de notre obéissance où l'exercice d'icelle a été
intermis pour y être paisiblement et librement exercé sans
aucun trouble ou empêchement. Défendant très expressément
à toutes personnes, de quelque état, qualité ou condition
qu'elles soient, sur les peines que dessus, de ne troubler, molester ni
inquiéter les ecclésiastiques en la célébration
du divin service, jouissance et perception des dîmes, fruits et
revenus de leurs bénéfices, et tous autres droits et devoirs
qui leur appartiennent; et que tous ceux qui, durant les troubles, se
sont emparés des églises, maisons, biens et revenus appartenant
auxdits ecclésiastiques et qui les détiennent et occupent,
leur en délaissent l'entière possession et paisible jouissance,
en tels droits, libertés et sûretés qu'ils avaient
auparavant qu'ils en fussent dessaisis. Défendant aussi très
expressément à ceux de ladite religion prétendue
réformée de faire prêches ni aucun exercice de ladite
religion ès églises, maisons et habitations desdits ecclésiastiques.
IV.
Sera au choix de ces ecclésiastiques d'acheter les maisons et
bâtiments construits aux places profanes sur eux occupées
durant les troubles, ou contraindre les possesseurs desdits bâtiments
d'acheter le fonds, le tout suivant l'estimation qui en sera faite par
experts dont les parties conviendront; et à faute d'en convenir,
leur en sera pourvu par les juges des lieux, sauf auxdits possesseurs
le recours contre qui il appartiendra. Et [au cas] où lesdits ecclésiastiques
contraindraient les possesseurs d' acheter le fonds, les deniers de l'estimation
ne seront mis en leurs mains ains [mais] demeureront lesdits possesseurs
chargés pour en faire profit à raison du denier vingt jusqu'à
ce qu'ils aient été employés au profit de l'Église,
ce qui se fera dans un an, et [au cas] où ledit temps passé,
l'acquéreur ne voudrait plus continuer ladite rente, il en sera
déchargé, en consignant les deniers entre les mains de personne
solvable avec l'autorité de la justice. Et pour les lieux sacrés,
en sera donné avis par les commissaires qui seront ordonnés
pour l'exécution du présent Édit, pour sur ce y être
par nous pourvu.
V.
Ne pourront toutefois les fonds et places occupés pour les réparations
et fortifications des villes et lieux de notre royaume, et les matériaux
y employés, être revendiqués ni répétés
[réclamés] par les ecclésiastiques ou autres personnes
publiques ou privées, que lorsque lesdites réparations et
fortifications seront démolies par nos ordonnances.
VI.
Et pour ne laisser aucune occasion de troubles et différends entre
nos sujets, avons permis et permettons à ceux de ladite religion
prétendue réformée vivre et demeurer par toutes les
villes et lieux de cestui notre royaume et pays de notre obéissance,
sans être enquis, vexés, molestés ni astreints à
faire chose pour le fait de la religion contre leur conscience, ni pour
raison d'icelle être recherchés dans les maisons et lieux
où ils voudront habiter, en se comportant au reste selon qu'il
est contenu en notre présent Édit.
VII.
Nous avons aussi permis à tous seigneurs, gentilshommes et autres
personnes, tant régnicoles qu'autres, faisant profession de la
religion prétendue réformée, ayant en notre royaume
et pays de notre obéissance haute justice ou plein fief de haubert,
comme en Normandie, soit en propriété ou usufruit, en tout
ou par moitié ou pour la troisième partie, avoir en telle
de leurs maisons desdites hautes justices ou fiefs susdits, qu'ils seront
tenus nommer devant nos baillis et sénéchaux, chacun en
son détroit, pour leur principal domicile l'exercice de ladite
religion, tant qu'ils y seront résidents, et en leur absence, leurs
femmes ou bien leur famille ou partie d'icelle. Et encore [en cas] que
le droit de justice ou plein fief de haubert soit controversé,
néanmoins l'exercice de ladite religion y pourra être fait,
pourvu que les dessusdits soient en possession actuelle de ladite haute
justice, encore que notre procureur général soit partie.
Nous leur permettons aussi avoir ledit exercice en leurs autres maisons
de haute justice ou fiefs susdits de haubert tant qu'ils y seront présents
et non autrement, le tout tant pour eux, leur famille, sujets, qu'autres
qui y voudront aller.
VIII.
Es maisons des fiefs où ceux de ladite religion n'auront ladite
haute justice ou fief de haubert, ne pourront faire ledit exercice que
pour leur famille tant seulement. N'entendons toutefois, s'il y survenait
d'autres personnes jusqu'au nombre de trente, outre leur famille, soit
à l'occasion des baptêmes, visites de leurs amis, ou autrement,
qu'ils en puissent être recherchés, moyennant aussi que lesdites
maisons ne soient au dedans des villes, bourgs ou villages appartenant
aux seigneurs hauts justiciers catholiques autres que nous esquels lesdits
seigneurs catholiques ont leurs maisons. Auquel cas, ceux de ladite religion
ne pourront dans lesdits villes, bourgs ou villages, faire ledit exercice,
si ce n'est par permission et congé desdits seigneurs hauts justiciers,
et non autrement.
IX.
Nous permettons aussi à ceux de ladite religion faire et continuer
l'exercice d'icelle en toutes les villes et lieux de notre obéissance
où il était par eux établi et fait publiquement par
plusieurs et diverses fois en l'année 1596 et en l'année
1597, jusqu'à la fin du mois d'août, nonobstant tous arrêts
et jugements à ce contraires.
X.
Pourra semblablement cet exercice être établi et rétabli
en toutes les villes et places où il a été établi
ou dû être par l'édit de pacification fait en l'année
1577, articles particuliers et conférences de Nérac et Fleix,
sans que ledit établissement puisse être empêché
ès lieux et places du domaine donnés par ledit édit,
articles et conférences, pour lieux de bailliages ou qui le seront
ci-après, encore qu'ils aient été depuis aliénés
à personnes catholiques ou le seront à l'avenir. N'entendons
toutefois que ledit exercice puisse être rétabli dans ès
lieux et places dudit domaine qui ont été cidevant possédés
par ceux de ladite religion prétendue réformée, esquels
il aurait été mis en considération de leurs personnes
ou à cause du privilège des fiefs, si lesdits fiefs se trouvent
à présent possédés par personnes de ladite
religion catholique, apostolique et romaine.
XI.
Davantage, en chacun des anciens bailliages, sénéchaussées
et gouvernements tenant lieu de bailliage, ressortissant nuement et sans
moyen ès cours de parlement, nous ordonnons qu'ès faubourgs
d'une ville, outre celles qui leur ont été accordées
par ledit Édit, articles particuliers et conférences, et
[au cas] où il n'y aurait des villes, en un bourg ou village l'exercice
de ladite religion prétendue réformée se pourra faire
publiquement pour tous ceux qui y voudront aller, encore qu'esdits bailliages,
sénéchaussées et gouvernements il y ait plusieurs
lieux où l'exercice soit à présent établi,
fors et excepté pour ledit lieu de bailliage nouvellement accordé
par le présent Édit, les villes esquelles il y a archevêché
et évêché, sans toutefois que ceux de ladite religion
prétendue réformée soient pour cela privés
de ne pouvoir demander et nommer pour ledit lieu d'exercice les bourgs
et villages proches desdites villes, excepté aussi les lieux et
seigneuries appartenant aux ecclésiastiques, esquelles nous n'entendons
que ledit second lieu de bailliage puisse être établi, les
en ayant de grâce spéciale exceptés et réservés.
Voulons et entendons sous le nom d' anciens bailliages parler de ceux
qui étaient du temps du feu roi Henry notre très-honoré
seigneur et beau-père, tenus pour bailliages, sénéchaussées
et gouvernements ressortissants sans moyen en nosdites cours.
XII.
N'entendons par le présent Édit déroger aux édits
et accords ci-devant faits pour la réduction d'aucuns princes,
seigneurs, gentilshommes et villes catholiques en notre obéissance,
en ce qui concerne l'exercice de ladite religion, lesquels édits
et accords seront entretenus et observés pour ce regard selon qu’il
sera porté par les instructions des commissaires qui seront ordonnés
pour l'exécution du présent Édit.
XIII.
Défendons très expressément à tous ceux de
ladite religion faire aucun exercice d'icelle tant pour le ministère,
règlement, discipline ou instruction publique d'enfants et autres,
en cestui notre royaume et pays de notre obéissance, en ce qui
concerne la religion, fois qu'ès lieux permis et octroyés
par le présent Édit.
XIV.
Comme aussi de faire aucun exercice de ladite religion en notre Cour
et suite, ni pareillement en nos terres et pays qui sont delà les
monts, ni aussi en notre ville de Paris, ni à cinq lieues de ladite
ville. Toutefois ceux de ladite religion demeurant esdites terres et pays
de delà les monts, et en notre ville, et cinq lieues autour d'icelle,
ne pourront être recherchés en leurs maisons, ni astreints
à faire chose pour le regard de leur religion contre leur conscience,
en se comportant au reste selon qu'il est contenu en notre présent
Edit.
XV.
Ne pourra aussi l'exercice public de ladite religion être fait
aux armées, sinon aux quartiers des chefs qui en feront profession,
autres toutefois que celui où sera le logis de notre personne.
XVI.
Suivant l'article deuxième de la conférence de Nérac,
nous permettons à ceux de ladite religion de pouvoir bâtir
des lieux pour l'exercice d'icelle, aux villes et places où il
leur est accordé, et leur seront rendus ceux qu'ils ont cidevant
bâtis ou le fonds d'iceux, en l'état qu'il est à présent,
même ès lieux où ledit exercice ne leur est permis,
sinon qu'ils eussent été convertis en autre nature d'édifices.
Auquel cas leur seront baillés par les possesseurs desdits édifices,
des lieux et places de même prix et valeur qu'ils étaient
avant qu'ils y eussent bâti, ou la juste estimation d'iceux à
dire d'experts, sauf auxdits propriétaires et possesseurs leurs
recours contre qui il appartiendra.
XVII.
Nous défendons à tous prêcheurs lecteurs, et autres
qui parlent en public, user d'aucunes paroles, discours et propos tendant
à exciter le peuple à sédition. Ains [mais] leur
avons enjoint et enjoignons de se contenir et comporter modestement et
de ne rien dire qui ne soit à l'instruction et édification
des auditeurs et à maintenir le repos et tranquillité par
nous établie en notredit royaume sur les peines portées
par nos précédent édits. Enjoignant très expressément
à nos procureurs généraux et leurs substituts d'informer
d'office contre ceux qui y contreviendront, à peine d'en répondre
en leurs propres et privés noms, et de privation de leurs offices.
XVIII.
Défendons aussi à tous nos sujets, de quelque qualité
et condition qu'ils soient, d'enlever par force ou induction, contre le
gré de leurs parents, les enfants de ladite religion pour les faire
baptiser ou confirmer en l'Église catholique, apostolique et romaine.
Comme aussi mêmes défenses sont faites à ceux de ladite
religion prétendue réformée, le tout à peine
d'être punis exemplairement.
XIX.
Ceux de ladite religion prétendue réformée ne seront
aucunement astreints ni demeureront obligés pour raison des abjurations,
promesses et serments qu'ils ont ci-devant faits, ou cautions par eux
baillées concernant le fait de ladite religion et n'en pourront
être molestés ni travaillés en quelque sorte que ce
soit.
XX.
Seront tenus aussi garder et observer les fêtes indictes en l'Église
catholique, apostolique et romaine, et ne pourront ès jours d'
icelles besogner, vendre ni étaler à boutiques ouvertes,
ni pareillement les artisans travailler hors leurs boutiques et en chambres
et maisons fermées, esdits jours de fêtes et autres jours
défendus, en aucun métier dont le bruit puisse être
entendu au dehors des passants ou des voisins, dont la recherche néanmoins
ne pourra être faite que par les officiers de la justice.
XXI.
Ne pourront les livres concernant ladite religion prétendue réformée
être imprimés et vendus publiquement qu'ès villes
et lieux où l'exercice public de ladite religion est permis. Et
pour les autres livres qui seront imprimés ès autres villes,
seront vus et visités, tant par nos officiers que théologiens,
ainsi qu'il est porté par nos ordonnances. Défendant très
expressément l'impression, publication et vente de tous livres,
libelles et écrits diffamatoires, sur les peines contenues en nos
ordonnances, enjoignant à tous nos juges et officiers d'y tenir
la main.
XXII.
Ordonnons qu'il ne sera fait différence ni distinction, pour le
fait de ladite religion, à recevoir les écoliers pour être
instruits ès universités, collèges et écoles,
et les malades et pauvres ès hôpitaux, maladreries et aumônes
publiques.
XXIII.
Ceux de ladite religion prétendue réformée seront
tenus garder les lois de l'Église catholique, apostolique et romaine,
reçues en notre cestui royaume pour le fait des mariages contractés
et à contracter ès degrés de consanguinité
et affinité.
XXIV.
Pareillement, ceux de ladite religion payeront les droits d'entrée
comme il est accoutumé pour les charges et offices dont ils seront
pourvus, sans être contraints assister à aucunes cérémonies
contraires à leurdite religion; et étant appelés
par serment, ne seront tenus d'en faire d'autre que de lever la main,
jurer et promettre à Dieu qu'ils diront la vérité;
et ne seront aussi tenus de prendre dispense de serment par eux prêté
en passant les contrats et obligations.
XXV.
Voulons et ordonnons que tous ceux de ladite religion prétendue
réformée et autres qui ont suivi leur parti, de quelque
état, qualité ou condition qu'ils soient, tenus et contraints
par toutes voies dues et raisonnables et sous les peines contenues aux
édits sur ce faits payer et acquitter les dîmes aux curés
et autres ecclésiastiques, et à tous autres à qui
elles appartiennent selon l'usage et coutume des lieux.
XXVI.
Les exhérédations ou privations, soit par disposition d'entre
vifs ou testamentaires, faites seulement en haine ou pour cause de religion
n'auront lieu tant pour le passé que pour l'avenir entre nos sujets.
XXVII.
Afin de réunir d' autant mieux les volontés de nos sujets,
comme est notre intention, et ôter toutes plaintes à l' avenir,
déclarons tous ceux qui font ou feront profession de ladite religion
prétendue réformée capables de tenir et exercer tous
états, dignités, offices et charges publiques quelconques,
royales, seigneuriales, ou des villes de notredit royaume, pays, terres
et seigneuries de notre obéissance, nonobstant tous serments à
ce contraires, et d'être indifféremment admis et reçus
en iceux et se contenteront nos cours de parlements et autres juges d'informer
et enquérir sur la vie, mœurs, religion et honnête conversation
de ceux qui sont ou seront pourvus d'offices, tant d'une religion que
d'autre, sans prendre d'eux autre serment que de bien et fidèlement
servir le Roi en l'exercice de leurs charges et garder les ordonnances
comme il a été observé de tout temps. Advenant aussi
vacation desdits états, charges et offices, pour le regard de ceux
qui seront en notre disposition, il y sera par nous pourvu indifféremment,
sans distinction de personnes capables, comme chose qui regarde l'union
de nos sujets. Entendons aussi que ceux de ladite religion prétendue
réformée puissent être admis et reçus en tous
conseils, délibérations, assemblées et fonctions
qui dépendent des choses dites dessus sans que pour raison de ladite
religion ils en puissent être rejetés ou empêchés
d'en jouir.
XXVIII.
Ordonnons pour l'enterrement des morts de ceux de ladite religion pour
toutes les villes et lieux de ce royaume, qu'il leur sera pourvu promptement
en chacun lieu par nos officiers et magistrats et par les commissaires
que nous députerons à l'exécution de notre présent
Édit d'une place la plus commode que faire se pourra. Et les cimetières
qu'ils avaient par ci-devant et dont ils ont été privés
à l'occasion des troubles leur seront rendus, sinon qu'ils se trouvassent
à présent occupés par édifices et bâtiments,
de quelque qualité qu'ils soient, auquel cas leur en sera pourvu
d'autres gratuitement.
XXIX .
Enjoignons très expressément à nosdits officiers
de tenir la main à ce qu'auxdits enterrements il ne se commette
aucun scandale, et seront tenus dans quinze jours après la réquisition
qui en sera faite, pourvoir à ceux de ladite religion de lieu commode
pour lesdites sépultures sans user de longueur et remise, à
peine de cinq cents écus en leur propres et privés noms.
Sont aussi faites défenses, tant auxdits officiers que tous autres,
de rien exiger pour la conduite desdits corps morts, sur peine de concussion.
XXX.
Afin que la justice soit rendue et administrée à nos sujets
sans aucune suspicion, haine ou faveur, comme étant un des principaux
moyens pour les maintenir en paix et concorde, avons ordonné et
ordonnons qu'en notre cour de parlement de Paris sera établie une
chambre composée d'un président et seize conseillers dudit
parlement, laquelle sera appelée et intitulée la Chambre
de l'Édit et connaîtra non seulement des causes et procès
de ceux de ladite religion prétendue réformée qui
seront dans l'étendue de ladite cour, mais aussi des ressorts de
nos parlements de Normandie et Bretagne, selon la juridiction qui lui
sera ci-après attribuée par ce présent Édit
et ce, jusqu'à tant qu'en chacun desdits parlements ait été
établie une chambre pour rendre la justice sur les lieux. Ordonnons
aussi que des quatre offices de conseillers en notredit parlement restant
de la dernière érection qui en a par nous été
faite en seront présentement pourvus et reçus audit parlement
quatre de ceux de ladite religion prétendue réformée
suffisants et capables qui seront distribués, à savoir le
premier reçu, en la Chambre de l'Édit et les autres trois,
à mesure qu'ils seront reçus, en trois des Chambres des
enquêtes. Et outre que des deux premiers offices de conseillers
lais [laïcs] de ladite cour qui viendront à vaquer par mort,
en seront aussi pourvus deux de ladite religion prétendue réformée
et iceux reçus, distribués aussi aux deux autres Chambres
des enquêtes.
XXXI.
Outre la chambre ci-devant établie à Castres pour le ressort
de notre cour de parlement de Toulouse, laquelle sera continuée
en l'état qu'elle est, nous avons pour les mêmes considérations
ordonné et ordonnons qu'en chacune de nos cours de parlement de
Grenoble et Bordeaux sera pareillement établie une chambre composée
de deux présidents, l’un catholique et l'autre de ladite
religion prétendue réformée, et douze conseillers
dont les six seront catholiques et les autres six de ladite religion,
lesquels président et conseillers catholiques seront par nous pris
et choisis des corps de nosdites cours. Et quant à ceux de ladite
religion sera fait création nouvelle d'un président et six
conseillers pour le parlement de Bordeaux et d'un président et
trois conseillers pour celui de Grenoble, lesquels avec les trois conseillers
de ladite religion qui sont à présent audit parlement seront
employés en la chambre de Dauphiné, et seront créés
lesdits offices de nouvelle création aux mêmes gages, honneurs,
autorités et prérogatives que les autres desdites cours,
et sera la séance de ladite chambre de Bordeaux, audit Bordeaux
ou à Nérac, et celle de Dauphiné, à Grenoble.
XXXII.
Ladite chambre de Dauphiné connaîtra des causes de ceux
de ladite religion prétendue réformée du ressort
de notre parlement de Provence, sans qu'ils aient besoin de prendre lettres
d'évocation ni autres provisions qu'en notre chancellerie de Dauphiné,
comme aussi ceux de ladite religion de Normandie et Bretagne ne seront
tenus prendre lettres d'évocation ni autres provisions qu'en notre
chancellerie de Paris.
XXXIII.
Nos sujets de ladite religion du parlement de Bourgogne auront le choix
et option de plaider en la chambre ordonnée au parlement de Paris
ou en celle de Dauphiné. Et ne seront aussi tenus prendre lettres
d'évocation ni autres provisions qu'esdites chancelleries de Paris
ou Dauphiné, selon l'option qu'ils feront.
XXXIV.
Toutes lesdites chambres composées comme dit est connaîtront
et jugeront en souveraineté et dernier ressort par arrêt
privativement à tous autres des procès et différends
mus et à mouvoir esquels de ladite religion prétendue réformée
seront parties principales, ou garants, en demandant ou défendant
en toutes matières, tant civiles que criminelles, soient lesdits
procès par écrit ou appellations verbales, et ce si bon
semble auxdites parties et l'une d'icelles le requiert, avant contestation
en cause, pour le regard des procès à mouvoir; excepté
toutefois pour toutes matières bénéficiales et les
possessoires des dîmes non inféodés, les patronats
ecclésiastiques et les causes où il s'agira des droits et
devoirs ou domaine de l'Église qui seront toutes traitées
et jugées ès cours de parlement, sans que lesdites chambres
de l'Édit en puissent connaître. Comme aussi nous voulons
que pour juger et décider les procès criminels qui interviendront
entre lesdits ecclésiastiques et ceux de ladite religion prétendue
réformée, si l'ecclésiastique est défendeur,
en ce cas la connaissance et jugement du procès criminel appartiendra
à nos cours souveraines, privativement auxdites chambres, et [dans
le cas] où l'ecclésiastique sera demandeur et celui de ladite
religion défendeur, la connaissance et jugement du procès
criminel appartiendra par appel et en dernier ressort auxdites chambres
établies. Connaîtront aussi lesdites chambres, en temps de
vacations, des matières attribuées par les édits
et ordonnances aux chambres établies en temps de vacations, chacune
en son ressort.
XXXV.
Sera la chambre de Grenoble dès à présent unie et
incorporée au corps de ladite cour de parlement et les présidents
et conseillers de ladite religion prétendue réformée
nommés présidents et conseillers de ladite cour, et tenus
du rang et nombreux d'iceux. Et à ces fins seront premièrement
distribués par les autres chambres, puis extraits et tirés
d'icelles pour être employés et servir en celle que nous
ordonnons de nouveau, à la charge toutefois qu'ils assisteront
et auront voix et séance en toutes les délibérations
qui se feront, les chambres assemblées, et jouiront des mêmes
gages, autorités et prééminences que font les autres
présidents et conseillers de ladite cour.
XXXVI.
Voulons et entendons que lesdites chambres de Castres et Bordeaux soient
réunies et incorporées en iceux parlements en la même
forme que les autres quand besoin sera, et que les causes qui nous ont
mû d'en faire l'établissement cesseront et n'auront plus
de lieu entre nos sujets, et seront à ces fins les présidents
et conseillers d'icelles, de ladite religion, nommés et tenus pour
présidents et conseillers desdites cours.
XXXVII.
Seront aussi créés et érigés de nouveau en
la chambre ordonnée pour le parlement de Bordeaux deux substituts
de nos procureurs et avocats généraux, dont celui du procureur
sera catholique et l'autre de ladite religion, lesquels seront pourvus
desdits offices aux gages compétents.
XXXVIII.
Ne prendront tous lesdits substituts autre qualité que de substitut,
et lorsque les chambres ordonnées pour les parlements de Toulouse
et Bordeaux seront unies et incorporées auxdits parlements, seront
lesdits substituts pourvus d'offices de conseillers en iceux.
XXXIX.
Les expéditions de la chancellerie de la chambre de Bordeaux se
feront en présence de deux conseillers d'icelle chambre, dont l'un
sera catholique et l'autre de ladite religion prétendue réformée,
en l'absence d'un des maîtres des requêtes de notre hôtel;
et l'un des notaires et secrétaires de ladite cour de parlement
de Bordeaux fera résidence au lieu où ladite chambre sera
établie, ou bien un des secrétaires ordinaires de la chancellerie,
pour signer les expéditions de ladite chancellerie.
XL.
Voulons et ordonnons qu'en ladite chambre de Bordeaux il y ait deux commis
du greffier dudit parlement, l’un au civil et l'autre au criminel,
qui exerceront leurs charges par nos commissions et seront commis aux
greffes civil et criminel et pourtant ne pourront être destitués
ni révoqués par lesdits greffiers du parlement; toutefois
seront tenus rendre l'émolument desdits greffes auxdits greffiers;
lesquels commis seront salariés par lesdits greffiers selon qu'il
sera avisé et arbitré par ladite chambre. Plus, y sera ordonné
des huissiers catholiques qui seront pris en la cour ou d'ailleurs, selon
notre bon plaisir, outre lesquels en sera de nouveau érigé
deux de ladite religion et pourvus gratuitement, et seront tous les huissiers
réglés par la chambre, tant en l'exercice et département
de leurs charges qu'ès émoluments qu'ils devront prendre.
Sera aussi expédiée commission d'un payeur des gages et
receveur des amendes de ladite chambre pour en être pourvu tel qu'il
nous plaira, si la chambre est établie ailleurs qu'en ladite ville;
et la commission ci-devant accordée au payeur des gages de la chambre
de Castres sortira son plein et entier effet; et sera jointe à
ladite charge la commission de la recette des amendes de ladite chambre.
XLI.
Sera pourvu de bonnes et suffisantes assignations pour les gages des
officiers des chambres ordonnées par cet Édit.
XLII.
Les présidents, conseillers et autres officiers catholiques desdites
chambres seront continués le plus longuement que faire se pourra
et comme nous verrons être à faire pour notre service et
le bien de nos sujets et en licenciant les uns sera pourvu d'autres en
leurs places avant leur pertement [départ] sans qu'ils puissent
durant le temps de leur service se départir ni absenter desdites
chambres sans le congé d' icelles qui sera jugé sur les
causes de l'ordonnance.
XLIII.
Seront lesdites chambres établies dedans six mois, pendant lesquels,
si tant l'établissement demeure à être fait, les procès
mus et à mouvoir où ceux de ladite religion seront parties,
des ressorts de nos parlements de Paris, Rouen, Dijon et Rennes, seront
évoqués en la chambre établie présentement
à Paris en vertu de l'édit de l'an 1577, ou bien au Grand
Conseil, au choix et option de ceux de ladite religion, s'ils le requièrent.
Ceux qui seront du parlement de Bordeaux, en la chambre établie
à Castres ou audit Grand Conseil, à leur choix, et ceux
qui seront de Provence, au parlement de Grenoble. Et si lesdites Chambres
ne sont établies dans trois mois après la présentation
qui y aura été faite de notre présent Édit,
celui de nos parlements qui en aura fait refus sera interdit de connaître
et juger des causes de ceux de ladite religion.
XLIV.
Les procès non encore jugés, pendants esdites cours de
parlement et Grand Conseils, de la qualité susdite, seront renvoyés,
en quelque état qu'ils soient, esdites chambres, chacun en son
ressort, si l'une des parties de ladite religion le requiert, dedans quatre
mois après l'établissement d'icelles, et quant à
ceux qui seront discontinués et ne sont en état de juger,
lesdits de la religion seront tenus faire déclaration à
la première intimation et signification qui leur sera faite de
la poursuite, et ledit temps passé, ne seront plus reçus
à requérir lesdits renvois.
XLV.
Lesdites chambres de Grenoble et Bordeaux, comme aussi celle de Castres,
garderont les formes et style des parlements au ressort desquels elles
seront établies, et jugeront en nombre égal d'une et d'autre
religion, si les parties ne consentent au contraire.
XLVI.
Tous les juges auxquels l'adresse sera faite des exécutions des
arrêts, commissions desdites chambres et lettres obtenues ès
chancelleries d'icelles, ensemble tous huissiers et sergents seront tenus
les mettre à exécution, et lesdits huissiers et sergents
faire tous exploits par tout notre royaume, sans demander placet, visa
ne pareatis, à peine de suspension de leurs états et des
dépens, dommages et intérêts des parties, dont la
connaissance appartiendra auxdites chambres .
XLVII.
Ne seront accordées aucunes évocations des causes dont
la connaissance est attribuée auxdites chambres, sinon ès
cas des ordonnances dont le renvoi sera fait à la plus prochaine
chambre établie suivant notre Édit; et les partages des
procès desdites chambres seront jugés en la plus prochaine,
observant la proportion et forme desdites chambres dont les procès
seront procédés ; excepté pour la Chambre de l'Édit
en notre parlement de Paris où les procès partis seront
départis en la même chambre, par les juges qui seront par
nous nommés par nos lettres particulières pour cet effet,
si mieux les parties n'aiment attendre le renouvellement de ladite chambre.
Et advenant qu'un même procès soit parti en toutes les chambres
mi-parties, le partage sera renvoyé à ladite chambre de
Paris.
XLVIII.
Les récusations qui seront proposées contre les présidents
et conseillers des chambres mi-parties pourront être jugées
au nombre de six, auquel nombre les parties seront tenues de se restreindre,
autrement sera passé outre, sans avoir égard auxdites récusations.
XLIX.
L'examen des présidents et conseillers nouvellement érigés
esdites chambres mi-parties sera fait en notre privé Conseils ou
par lesdites chambres, chacune en son détroit, quand elles seront
en nombre suffisant, et néanmoins le serment accoutumé sera
par eux prêté dans les cours où lesdites chambres
seront établies et, à leur refus, en notre dit Conseil privé
excepté ceux de la chambre de Languedoc, lesquels prêteront
le serment ès mains de notre chancelier ou en icelle chambre.
L.
Voulons et ordonnons que la réception de nos officiers de ladite
religion soit jugée esdites chambres mi-parties par la pluralité
des voix, comme il est accoutumé pour les autres jugements, sans
qu'il soit besoin que les opinions surpassent des deux tiers suivant l'ordonnance,
à laquelle pour ce regard est dérogé.
LI.
Seront faites aux chambres mi-parties les propositions, délibérations
et résolutions qui appartiendront au repos public et pour l'état
particulier et police des villes où icelles chambres seront.
LII.
L'article de la juridiction desdites chambres ordonnées par le
présent Édit sera suivi et observé selon sa forme
et teneur, même en ce qui concerne l'exécution, inexécution
ou infraction de nos édits, quand ceux de ladite religion seront
parties.
LIII.
Les officiers subalternes royaux ou autres dont la réception appartient
à nos cours de parlement, s'ils sont de ladite religion prétendue
réformée, pourront être examinés et reçus
esdites chambres, à savoir ceux des ressorts des parlements de
Paris, Normandie et Bretagne en la chambre de Paris; ceux de Dauphiné
et Provence en la chambre de Grenoble; ceux de Bourgogne en ladite Chambre
de Paris ou de Dauphiné à leur choix; ceux du ressort de
Toulouse en la chambre de Castres, et ceux du parlement de Bordeaux en
la chambre de Guyenne, sans qu'autres se puissent opposer à leur
réception et rendre parties, que nos procureurs généraux
ou leurs substituts et les pourvus esdits offices. Et néanmoins
le serment accoutumé sera par eux prêté ès
cours de parlements, lesquelles ne pourront prendre aucune connaissance
de leursdites réceptions, et au refus desdits parlements, lesdits
officiers prêteront le serment esdites chambres, après lequel
ainsi prêté, seront tenus présenter par un huissier
ou notaire l'acte de leurs réceptions aux greffiers desdites cours
de parlements et en laisser copie collationnée auxdits greffiers,
auxquels est enjoint d'enregistrer lesdits actes, à peine de tous
dépens, dommages et intérêts des parties. Et [au cas]
où lesdits greffiers seront refusant de ce faire, suffira auxdits
officiers de rapporter l'acte de ladite sommation expédié
par lesdits huissiers ou notaires, et icelle faire enregistrer au greffe
de leursdites juridictions pour y avoir recours quand besoin sera, à
peine de nullité de leurs procédures et jugements. Et quant
aux officiers dont la réception n' a accoutumé d'être
faite en nosdits parlements en cas que ceux à qui elle appartient
fissent refus de procéder audit examen et réception, se
retireront lesdits officiers par devers lesdites chambres, pour leur être
pourvu comme il appartiendra.
LIV.
Les officiers de ladite religion prétendue réformée
qui seront pourvus ci-après pour servir dans les corps de nos cours
de parlements, Grand Conseil, chambres des comptes, cours des aides, bureaux
des trésoriers généraux de France et autres officiers
des finances seront examinés et reçus ès lieux où
ils ont accoutumé de l'être; et en cas de refus ou déni
de justice, leur sera pourvu en notre Conseil privé.
LV.
Les réceptions de nos officiers faites en la chambre ci-devant
établie à Castres demeureront valables, nonobstant tous
arrêts et ordonnances à ce contraires. Seront aussi valables
les réceptions des juges, conseillers, élus et autres officiers
de ladite religion faites en notre privé Conseil ou par commissaires
par nous ordonnés pour le refus de nos cours de parlements, des
aides et chambres des comptes, tout ainsi que si elles étaient
faites esdites cours et chambres et par les autres juges à qui
la réception appartient; et seront leurs gages alloués par
les chambres des comptes sans difficulté; et si aucuns ont été
rayés, seront rétablis sans qu'il soit besoin d' autre jussion
que le présent Édit et sans que lesdits officiers soient
tenus de faire apparaître d'autre réception, nonobstant tous
arrêts donnés au contraire, lesquels demeureront nuls et
de nul effet.
LVI.
En attendant qu'il y ait moyen de subvenir aux frais de justice desdites
chambres sur les deniers des amendes, sera par nous pourvu d'assignation
valable et suffisante pour fournir auxdits frais, sauf d'en répéter
[réclamer] les deniers sur les biens des condamnés.
LVII.
Les présidents et conseillers de ladite religion prétendue
réformée ci-devant reçus en notre cour de parlement
du Dauphiné et en la Chambre de l'Édit incorporée
en icelle continueront et auront leurs séances et ordres d'icelles,
à savoir, les présidents comme ils en ont joui et jouissent
à présent, et les conseillers suivant les arrêts et
provisions qu'ils en ont obtenus en notre Conseil privé.
LVIII.
Déclarons toutes sentences, jugements, arrêts, saisies,
ventes et décrets faits et donnés contre ceux de ladite
religion prétendue réformée, tant vivants que morts,
depuis le trépas du feu roi Henry second, notre très-honoré
seigneur et beau-père, à l'occasion de ladite religion,
tumultes et troubles depuis advenus, ensemble l'exécution d'iceux
jugements et décrets, dès à présent cassés,
révoqués et annulés, et iceux cassons, révoquons
et annulons, ordonnant qu'ils seront rayés et ôtés
des registres des greffes des cours, tant souveraines qu'inférieures.
Comme nous voulons aussi être ôtées et effacées
toutes marques, vestiges et monuments desdites exécutions, livres
et actes diffamatoires contre leurs personnes, mémoire et postérité,
et que les places esquelles été faites pour cette occasion
démolitions ou rasements soient rendues en tel état qu'elles
sont aux propriétaires d'icelles, pour en jouir et disposer à
leur volonté. Et généralement avons cassé,
révoqué et annulé toutes procédures et informations
faites pour entreprises quelconques, prétendus crimes de lèse-majesté
et autres; nonobstant lesquelles procédures, arrêts et jugements
contenant réunion, incorporation et confiscation, voulons que ceux
de ladite religion et autres qui ont suivi leur parti ou leurs héritiers
rentrent en la possession réelle et actuelle de tous et chacuns
leurs biens.
LIX.
Toutes procédures faites, jugements et arrêts donnés
durant les troubles contre ceux de ladite religion qui ont porté
les armes ou se sont retirés hors de notre royaume ou dans icelui,
ès villes et pays par eux tenus, en quelque autre matière
que de la religion et troubles, ensemble toutes péremptions d'instances,
prescriptions tant légales, conventionnelles que coutumières,
et saisies féodales échues pendant lesdits troubles ou par
empêchements légitimes provenus d'iceux et dont la connaissance
demeurera à nos juges, seront estimées comme non faites,
données ni advenues; et telles les avons déclarées
et déclarons et icelles mises et mettons à néant,
sans que les parties s'en puissent aucunement aider, ains [mais] seront
remises en l'état qu'elles étaient auparavant, nonobstant
lesdits arrêts et l'exécution d'iceux, et leur sera rendue
la possession en laquelle ils étaient pour ce regard. Ce que dessus
aura pareillement lieu pour le regard des autres qui ont suivi le parti
de ceux de ladite religion, ou qui ont été absents de notre
royaume pour le fait des troubles. Et pour les enfants mineurs de ceux
de la qualité susdite qui sont morts pendant les troubles, remettons
les parties au même état qu'elles étaient auparavant
sans refondre les dépens, ni être tenus de consigner les
amendes. N'entendons toutefois que les jugements donnés par les
juges présidiaux ou autres juges inférieurs contre ceux
de ladite religion ou qui ont suivi leur parti, demeurent nuls, s'ils
ont été donnés par juges siégeant ès
villes par eux tenues et qui leur étaient de libre accès.
LX.
Les arrêts donnés en nos cours de parlements, ès
matières dont la connaissance appartient aux chambres ordonnées
par l'édit de l'an 1577 et articles de Nérac et Fleix esquelles
cours les parties n'ont procédé volontairement, c'est-à-dire
ont allégué et proposé fins déclinatoires
ou qui ont été donnés par défaut ou forclusion,
tant en matière civile que criminelle, nonobstant lesquelles fins
lesdites parties ont été contraintes de passer outre, seront
pareillement nuls et de nulle valeur Et pour le regard des arrêts
donnés contre ceux de ladite religion, qui ont procédé
volontairement et sans avoir proposé fins déclinatoires,
iceux arrêts demeureront et néanmoins sans préjudice
de l'exécution d'iceux se pourront, si bon leur semble, pourvoir
par requête civile devant les chambres ordonnées par le présent
Édit, sans que le temps porté par les ordonnances ait couru
à leur préjudice. Et jusqu'à ce que ces chambres
et chancelleries d'icelles soient établies, les appellations verbales
ou par écrit interjetées par ceux de ladite religion devant
les juges, greffiers ou commis, exécuteurs des arrêts et
jugements, auront pareil effet que si elles étaient relevées
par lettres royaux.
LXI.
En toutes enquêtes qui se feront pour quelque cause que ce soit,
ès matières civiles, si l'enquêteur ou commissaire
est catholique, seront les parties tenues de convenir d'un adjoint et
[au cas] où ils n'en conviendraient, en sera pris d'office par
ledit enquêteur ou commissaire un qui sera de ladite religion prétendue
réformée et sera la même chose pratiquée quand
le commissaire ou enquêteur sera de ladite religion, pour l' adjoint
qui sera catholique.
LXII.
Voulons et ordonnons que nos juges puissent connaître de la validité
des testaments auxquels ceux de ladite religion auront intérêt,
s'ils le requièrent; et les appellations desdits jugements pourront
être relevées auxdites chambres ordonnées pour les
procès de ceux de ladite religion, nonobstant toutes coutumes à
ce contraires, même celle de Bretagne.
LXIII.
Pour obvier tous différends qui pourraient survenir entre nos
cours de parlements et les chambres d'icelles cours ordonnées par
notre présent Édit, sera par nous fait un bon et ample règlement
entre lesdites cours et chambres, et tel que ceux de ladite religion prétendue
réformée jouiront entièrement dudit Édit,
lequel règlement sera vérifié en nos cours de parlements
et gardé et observé, sans avoir égard aux précédents.
LXIV.
Inhibons et défendons à toutes nos cours souveraines et
autres de ce royaume de connaître et juger les procès civils
et criminels de ceux de ladite religion, dont par notre Édit est
attribuée la connaissance auxdites chambres, pourvu que le renvoi
en soit demandé, comme il est dit au XLC article ci-dessus.
LXV.
Voulons aussi par manière de provision, et jusqu'à ce qu'en
ayons autrement ordonné, qu'en tous procès mus ou à
mouvoir où ceux de ladite religion seront en qualité de
demandeurs ou défendeurs parties principales ou garants ès
matières civiles esquelles nos officiers et sièges présidiaux
ont pouvoir de juger en dernier ressort, leur soit permis de requérir
que deux de la chambre où les procès se devront juger; s'abstiennent
du jugement d'iceux; lesquels sans expression de cause seront tenus s'en
abstenir, nonobstant l'ordonnance par laquelle les juges ne se peuvent
tenir pour récusés sans cause, leur demeurant outre ce les
récusations de droit contre les autres; et ès esquelles
matières criminelles aussi lesdits présidiaux et autres
juges royaux subalternes jugent en dernier ressort, pourront les prévenus
étant de ladite religion requérir que trois desdits juges
s' abstiennent du jugement de leurs procès, sans expression de
cause Et les prévôts des maréchaux de France, vibaillis,
visénéchaux, lieutenants de robe Courte et autres officiers
de semblable qualité jugeront suivant les ordonnances et règlements
ci-devant donnés pour le regard des vagabonds; et quant aux domiciliés,
chargés et prévenus des cas prévôtaux, s'ils
sont de ladite religion, pourront requérir que trois desdits juges
qui en peuvent connaître s'abstiennent du jugement de leur procès
et seront tenus s'en abstenir, sans aucune expression de cause, sauf si
en la compagnie où lesdits procès se jugeront se trouvaient
jusqu'au nombre de deux en matière civile et trois en matière
criminelle de ladite religion, auquel cas ne sera permis de récuser
sans expression de cause; ce qui sera commun et réciproque aux
catholiques en la forme que dessus, pour le regard desdites récusations
de juges où ceux de ladite religion prétendue réformée
seront en plus grand nombre. N'entendons toutefois que lesdits sièges
présidiaux, prévôts des maréchaux, vibaillis,
visénéchaux et autres qui jugent en dernier ressort prennent
en vertu de ce que dit est connaissance des troubles passés. Et
quant aux crimes et excès advenus par autre occasion que du fait
des troubles, depuis le commencement du mois de mars de l'année
1585 jusqu'à la fin de l'année 1597, en cas qu'ils en prennent
connaissance, voulons qu'il y puisse avoir appel de leurs jugements par
devant les chambres ordonnées par le présent édit
comme il se pratiquera en semblable pour les catholiques complices, et
où ceux de ladite religion prétendue réformée
seront parties.
LXVI.
Voulons aussi et ordonnons que dorénavant, en toutes instructions
autres qu'informations de procès criminels ès sénéchaussées
de Toulouse, Carcassonne, Rouergue, Lauraguais, Béziers, Montpellier
et Nîmes, le magistrat ou commissaire député pour
ladite instruction, s'il est catholique, sera tenu prendre un adjoint
qui soit de ladite religion prétendue réformée, dont
les parties conviendront et [au cas] où ils n'en pourraient convenir,
en sera pris d'office un de ladite religion par le susdit magistrat ou
commissaire; comme en semblable, si ledit magistrat ou commissaire est
de ladite religion, il sera tenu, en la même forme susdite, prendre
un adjoint catholique.
LXVII.
Quand il sera question de faire procès criminel par les prévôts
des maréchaux ou leurs lieutenants à quelqu'un de ladite
religion domicilié qui sera chargé et accusé d'un
crime prévôtal, lesdits prévôts ou leursdits
lieutenants, s'ils sont catholiques, seront tenus d'appeler à l'instruction
desdits procès un adjoint de ladite religion, lequel adjoint assistera
aussi au jugement de la compétence et au jugement définitif
dudit procès, laquelle compétence ne pourra être jugée
qu'au plus prochain siège présidial, en assemblée,
avec les principaux officiers dudit siège qui seront trouvés
sur les lieux, à peine de nullité, sinon que les prévenus
requissent que la compétence fût jugée esdites chambres
ordonnées par le présent Édit; auquel cas, pour le
regard des domiciliés ès provinces de Guyenne, Languedoc,
Provence et Dauphiné, les substituts de nos procureurs généraux
esdites chambres feront, à la requête d'iceux domiciliés,
apporter en icelles les charges et informations faites contre iceux pour
connaître et juger si les causes sont prévôtables ou
non, pour après selon la qualité des crimes être par
icelles chambres renvoyés à l'ordinaire ou jugés
prévôtablement, ainsi qu'ils Verront être à
faire par raison, en observant le contenu en notre présent Édit
et seront tenus les juges présidiaux, prévôts des
maréchaux, vibaillis, visénéchaux et autres qui Jugent
en dernier ressort de respectivement obéir et satisfaire aux commandements
qui leur seront faits par lesdites chambres, tout ainsi qu'ils ont accoutumé
de faire auxdits parlements, à peine de privation de leurs états.
LXVIII.
Les criées, affiches et subhastations des héritages dont
on poursuit le décret seront faites ès lieux et heures accoutumées,
si faire se peut, suivant nos ordonnances, ou bien ès marchés
publics, si, au lieu où sont assis les héritages y a marché
[au cas] où il n'y en aurait point, seront faites au plus prochain
marché du ressort du siège où l'adjudication se doit
faire, et seront les affiches mises au poteau dudit marché et à
l'entrée de l' auditoire dudit lieu, et par ce moyen seront bonnes
et valables lesdites criées et passé outre à l' interposition
du décret, sans s'arrêter aux nullités qui pourraient
être alléguées pour ce regard.
LXIX.
Tous titres, papiers, enseignements et documents qui ont été
pris seront rendus et restitués de part et d'autre à ceux
à qui ils appartiennent, encore que lesdits papiers ou les châteaux
et maisons esquels ils étaient gardés aient été
pris et saisis, soit par spéciales commissions du feu roi dernier
décédé, notre très-honoré seigneur
et beau-frère, ou nôtres, ou par les mandements des gouverneurs
et lieutenants généraux de nos provinces, ou de l'autorité
des chefs de l'autre part, ou sous quelque autre prétexte que ce
soit.
LXX.
Les enfants de ceux qui se sont retirés hors de notre royaume,
depuis la mort du feu roi Henry deuxième, notre très-honoré
seigneur et beau-père, pour cause de la religion et troubles, encore
que lesdits enfants soient nés hors ledit royaume, seront tenus
pour vrais François et régnicoles, et tels les avons déclarés
et déclarons, sans qu'il leur soit besoin prendre lettres de naturalité
ou autres provisions de nous que le présent Edit, nonobstant toutes
lettres à ce contraires, auxquelles nous avons dérogé
et dérogeons; à la charge que lesdits enfants nés
ès pays étrangers seront tenus, dans dix ans après
la publication du présent Édit, de venir demeurer dans ce
royaume.
LXXI.
Ceux de ladite religion prétendue réformée et autres
qui ont suivi leur parti, lesquels auraient pris à ferme avant
les troubles aucuns greffes ou autre domaine, gabelle, imposition foraine
et autres droits à nous appartenant dont ils n' ont pu jouir à
cause d' iceux troubles, demeureront déchargés, comme nous
les déchargeons de ce qu'ils n'auront reçu desdites fermes,
ou qu'ils auront sans fraude payé ailleurs qu'ès recettes
de nos finances, nonobstant toutes obligations sur ce par eux passées.
LXXII.
Toutes places, villes et provinces de notre royaume, pays, terres et
seigneuries de notre obéissance useront et jouiront des mêmes
privilèges, immunités, libertés, franchises, foires,
marchés, juridictions et sièges de justice qu'elles faisaient
auparavant les troubles commencés, au mois de mars [l'an] 1585
et autres précédents, nonobstant toutes lettres à
ce contraires et les translations d'aucuns desdits sièges, pourvu
qu'elles aient été faites seulement à l'occasion
des troubles, quels sièges seront remis et rétablis ès
villes et lieux où ils étaient auparavant.
LXXIII.
S'il y a quelques prisonniers qui soient encore détenus par autorité
de justice ou autrement, même ès galères, à
l'occasion des troubles ou de ladite religion, seront élargis et
mis en pleine liberté.
LXXIV.
Ceux de ladite religion ne pourront ci-après être surchargés
et foulés d'aucunes charges ordinaires ou extraordinaires plus
que les catholiques et selon la proportion de leurs biens et facultés
et pourront les parties qui prétendront être surchargés
se pourvoir par devant les juges auxquels la connaissance en appartient,
et seront tous nos sujets, tant de la religion catholique que prétendue
réformée, indifféremment déchargés
de toutes charges qui ont été imposées de part et
d'autre durant les troubles sur ceux qui étaient de contraire parti
et non consentants, ensemble des dettes créées et non payées,
frais faits sans le consentement d'iceux, sans toutefois pouvoir répéter
[réclamer] les fruits qui auront été employés
au paiement desdites charges.
LXXV.
N'entendons aussi que ceux de ladite religion et autres qui ont suivi
leur parti, ni les catholiques qui étaient demeurés ès
villes et lieux par eux occupés et détenus, et qui leur
ont contribué soient poursuivis pour le paiement des tailles, aides,
octrois, crues, taillon, ustensiles, réparations et autres impositions
et subsides échus et imposés durant les troubles advenus
devant et jusqu'à notre avènement à la Couronne,
soit par les édits, mandements des feu Rois nos prédécesseurs,
ou par l'avis et délibération des gouverneurs et Etats des
provinces, cours de parlement et autres, dont nous les avons déchargés
et déchargeons, en défendant aux trésoriers généraux
de France et de nos finances, receveurs généraux et particuliers,
leurs commis entremetteurs et autres intendants et commissaires de nosdites
finances, les rechercher, molester, ni inquiéter directement ou
indirectement, en quelque sorte que ce soit.
LXXVI.
Demeureront tous, chefs, seigneurs, chevaliers, gentilshommes, officiers,
corps de villes et communautés, et tous les autres qui les ont
aidés et secourus, leurs veuves, hoirs et successeurs, quittes
et déchargés de tous deniers qui ont été par
eux et leurs ordonnances pris et levés, tant des deniers royaux,
à quelque somme qu'ils se puissent monter, que des villes, communautés
et particuliers, des rentes, revenus, argenterie, ventes de biens meubles
ecclésiastiques et autres, bois de haute futaie soit du domaine
ou autres, amendes, butins, rançons ou autre nature de deniers
par eux pris à l'occasion des troubles commencés au mois
de mars 1585 et autres troubles précédents jusqu'à
notre avènement à la Couronne, sans qu'ils ni ceux qui auront
été par eux commis à la levée desdits deniers
et qui les ont baillés ou fournis par leurs ordonnances en puissent
être aucunement recherchés à présent ni pour
l'avenir; et demeureront quittes, tant eux que leurs commis, de tout le
maniement et administration desdits deniers, en rapportant pour toutes
décharges dans quatre mois après la publication du présent
Édit faite en notre cour de parlement de Paris, acquits dument
expédiés des chefs de ceux de ladite religion ou de ceux
qui auront été par eux commis à l'audition et clôture
des comptes, ou des communautés des villes qui ont eu commandement
et charge durant lesdits troubles. Demeureront pareillement quittes et
déchargés de tous actes d'hostilité, levée
et conduite de gens de guerre, fabrication et évaluation de monnaie,
faite selon l'ordonnance desdits chefs, fonte et prise d'artillerie et
munitions, confection de poudres et salpêtres, prises, fortifications,
démantèlements et démolitions des villes, châteaux,
bourgs et bourgades, entreprises sur icelles, brûlements et démolitions
d'églises et maisons, établissement de justice, jugements
et exécutions d'iceux, soit en matière civile ou criminelle,
police et règlement faits entre eux, voyages et intelligences,
négociations, traités et contrats faits avec tous princes
et communautés étrangères et introduction desdits
étrangers ès villes et autres endroits de notre royaume
et généralement de tout ce qui a été fait,
géré et négocié durant lesdits troubles depuis
la mort du feu Roi Henry deuxième, notre très-honoré
seigneur et beaupère, par ceux de ladite religion et autres qui
ont suivi leur parti, encore qu'il dût être particulièrement
exprimé et spécifié.
LXXVII.
Demeureront aussi déchargés ceux de ladite religion de
toutes assemblées générales et provinciales par eux
faites et tenues, tant à Mantes que depuis ailleurs jusqu'à
présent, ensemble des conseils par eux établis et ordonnés
par les provinces, délibérations, ordonnances et règlements
faits auxdites assemblées et conseils, établissement et
augmentations de garnisons, assemblées de gens de guerre, levées
et prises de nos deniers, soit entre les mains des receveurs généraux
ou particuliers, collecteurs des paroisses ou autrement, en quelque façon
que ce soit, arrêts de seel, continuation ou érection nouvelle
des traites et péages, et recettes d'iceux, même à
Royan et sur les rivières de Charente, Garonne, du Rhône
et Dordogne, armements et combats par mer, et tous accidents et excès
advenus pour faire payer lesdites traites, péages et autres deniers,
fortifications des villes, châteaux et places, impositions de deniers
et corvées, recettes d'iceux deniers, destitution de nos receveurs
et fermiers et autres officiers, établissement d'autres en leurs
places et de toutes unions, dépêches et négociations
faites tant dedans que dehors le royaume; généralement de
tout ce qui a été fait, délibéré, écrit
et ordonné par lesdites assemblées et conseils, sans que
ceux qui ont donné leurs avis, signé et exécuté,
fait signer et exécuter lesdits ordonnances, règlements
et délibérations en puissent être recherchés,
ni leurs veuves, héritiers et successeurs, ores [aujourd'hui] ni
à l'avenir, encore que les particularités ne soient ici
à plein déclarées. Et sur le tout sera imposé
silence perpétuel à nos procureurs généraux,
leurs substituts et tous ceux qui pourraient y prétendre intérêt
en quelque façon et manière que ce soit, nonobstant tous
arrêts, sentences, jugements, informations et procédures
faites au contraire.
LXXVIII.
Approuvons en outre, validons et autorisons les comptes qui ont été
ouïs, clos et examinés par les députés de ladite
assemblée, voulons qu'iceux, ensemble les acquits et pièces
qui ont été rendues par les comptables, soient portées
en notre chambre des comptes de Paris, trois mois après la publication
du présent Édit et mises ès mains de notre procureur
général pour être délivrés au garde
des livres et registres de notre dite chambre pour y avoir recours toutes
fois et quante que besoin sera, sans que lesdits comptes puissent être
revus, ni lesdits comptables tenus à aucune comparution ni correction,
sinon en cas d'omission de recette ou faux acquits, imposant silence à
notre dit procureur général pour le surplus que l'on voudrait
dire être défectueux et les formalités n' avoir été
bien gardées. Défendant aux gens de nos comptes, tant de
Paris que des autres provinces où elles sont établies, d'en
prendre aucune connaissance en quelque sorte ou manière que ce
soit.
LXXIX.
Et pour le regard des comptes qui n'auront encore été rendus,
voulons iceux être ouïs, clos et examinés par les commissaires
qui a ce seront par nous députés, lesquels sans difficulté
passeront et alloueront toutes les parties payées par lesdits comptables
en vertu des ordonnances de ladite assemblée, ou autre ayant pouvoir.
LXXX.
Demeureront tous collecteurs, receveurs, fermiers et tous autres bien
et dûment déchargés de toutes les sommes de deniers
qu'ils ont payées auxdits commis de ladite assemblée, de
quelque nature qu'ils soient, jusqu'au dernier jour de ce mois. Voulons
le tout être passé et alloué aux comptes qui s'en
rendront en nos chambres des comptes purement et simplement en vertu des
quittances qui seront ci-après rapportées et si aucunes
étaient ci-après expédiées ou délivrées,
elles demeureront nulles, et ceux qui les accepteront ou délivreront
seront condamnés à l'amende de faux emploi. Et [au cas]
où il y aurait quelques comptes déjà rendus, sur
lesquels seraient intervenues aucunes radiations ou charges, pour ce regard
avons icelles ôtées et levées, rétabli et rétablissons
lesdites parties entièrement, en vertu, de ces présentes,
sans qu'il soit besoin pour tout ce que dessus de lettres particulières
ni autre chose que l'extrait du présent article.
LXXXI.
Les gouverneurs, capitaines, consuls et personnes commises au recouvrement
des deniers pour payer les garnisons des places tenues par ceux de ladite
religion auxquels nos receveurs et collecteurs des paroisses auraient
fourni par prêt sur leurs cédules et obligations, soit par
contrainte ou pour obéir aux commandements qui leur en ont été
faits par les trésoriers généraux, les deniers nécessaires
pour l'entretenement desdites garnisons jusqu'à la concurrence
de ce qui était porté par l'état que nous avons fait
expédier au commencement de l'an 1596 et augmentations depuis par
nous accordées, seront tenus quittes et déchargés
de ce qui a été payé pour l' effet susdit, encore
que lesdites cédules et obligations n'en soit fait expresse mention,
lesquelles leur seront rendues comme nulles. Et pour y satisfaire, les
trésoriers et généraux en chacune généralité
feront fournir par les receveurs particuliers de nos tailles leurs quittances
auxdits collecteurs et par les receveurs généraux leurs
quittances auxdits receveurs particuliers, pour la décharge desquels
receveurs généraux seront les sommes dont ils auront tenu
compte, ainsi que dit est, dossées [endossées] sur les mandements
levés par le trésorier de l'Épargne, sous les noms
des trésoriers généraux de l'extraordinaire de nos
guerres, pour le paiement desdites garnisons; et [au cas] où lesdits
mandements ne monteront autant que porte notre dit état de l'année
1596 et augmentation, ordonnons que pour y suppléer seront expédiés
nouveaux mandements de ce qui s’en défaudroit pour la décharge
de nos comptables et restitution desdites promesses et obligations, en
sorte qu'il n'en soit rien demandé à l'avenir à ceux
qui les auront faites, et que toutes lettres de validations qui seront
nécessaires pour la décharge des comptables seront expédiées
en vertu du présent article.
LXXXII.
Aussi ceux de ladite religion se départiront et désisteront
dès à présent de toutes pratiques, négociations
et intelligences, tant dedans que dehors notre royaume et lesdites assemblées
et conseils établis dans les provinces se sépareront promptement
et seront toutes ligues et associations faites ou à faire sous
quelque prétexte que ce soit, au préjudice de notre présent
édit cassées et annulées comme nous les cassons et
annulons. Défendant très expressément à tous
nos sujets de faire dorénavant aucunes cotisations et levées
de deniers sans notre permission, fortification, enrôlement d'hommes,
congrégations et assemblées autres que celles qui leur sont
permises par notre Édit, et sans armes, ce que nous prohibons et
défendons, sur peine d'être punis rigoureusement, et comme
contempteurs et infracteurs de nos mandements et ordonnances.
LXXXIII.
Toutes prises qui ont été faites par mer durant les troubles
en vertu des congés et aveux donnés et celles qui ont été
faites par terre sur ceux de contraire parti et qui ont été
jugées par les juges et commissaires de l'amirauté, ou par
les chefs de ceux de ladite religion ou leur conseil, demeureront assoupies
sous le bénéfice de notre présent Édit, sans
qu'il en puisse être fait aucune poursuite, ni les capitaines et
autres qui ont fait lesdites prises, leurs cautions et lesdits juges et
officiers, leurs veuves et héritiers, recherchés ni molestés
en quelque sorte que ce soit, nonobstant tous arrêts de notre Conseil
privé et des parlements et toutes lettres de marques et saisies
pendantes et non jugées, dont nous voulons leur être faite
pleine et entière main-levée.
LXXXIV.
Ne pourront semblablement être recherchés ceux de ladite
religion des oppositions et empêchements qu'ils ont donnés
par ci-devant, même depuis les troubles, à l'exécution
des arrêts et jugements donnés pour le rétablissement
de la religion catholique, apostolique et romaine en divers lieux de ce
royaume.
LXXXV.
Et quant à ce qui a été fait ou pris durant les
troubles, hors la voie d'hostilité ou par hostilité contre
les règlements publics ou particuliers des chefs ou des communautés
des provinces qui avaient commandement, en pourra être faite poursuite
par la voie de justice.
LXXXVI.
D'autant néanmoins que si ce qui a été fait contre
les règlements d'une part et d'autre est indifféremment
excepté et réservé de la générale abolition
portée par notre présent Edit, et sujet à être
recherché, il n'y a homme de guerre qui ne puisse être mis
en peine, dont pourrait advenir renouvellement de troubles; à cette
cause, nous voulons et ordonnons que seulement les cas exécrables
demeureront exceptés de ladite abolition, comme ravissements et
forcements de femmes et filles, brûlements, meurtres et voleries
faites par prodition et de guet-apens hors des voies d'hostilité
et pour exercer vengeances particulières contre le devoir de la
guerre, infractions de passeports et sauvegardes, avec meurtre et pillage
sans commandement pour le regard de ceux de ladite religion et autres
qui ont suivi leur parti des chefs qui ont eu autorité sur eux,
fondé sur particulières occasions qui les ont mus à
le commander et ordonner.
LXXXVII.
Ordonnons aussi que punition sera faite des crimes et délits commis
entre personnes de même parti si ce n'est en actes commandés
par les chefs d'une part et d'autre, selon la nécessité,
loi et ordre de la guerre. Et quant aux levées et exactions de
deniers, port d'armes et autres exploits de guerre faits d'autorité
privée et sans aveu, en sera faite poursuite par voie de justice.
LXXXVIII.
Dans les villes démantelées pendant les troubles, pourront
les ruines et démantèlements d'icelles être par notre
permission réédifiées et réparées par
les habitants, à leurs frais et dépens, et les provisions
octroyées ci-devant pour ce regard tiendront et auront lieu.
LXXXIX
Ordonnons, voulons et nous plaît que tous les seigneurs, chevaliers,
gentilshommes et autres, de quelque qualité et condition qu'ils
soient, de la religion prétendue réformée et autres
qui ont suivi leur parti rentrent et soient effectuellement conservés
en la jouissance de tous et chacuns leurs biens, droits, noms, raisons
et actions, nonobstant les jugements ensuivis durant lesdits troubles
et à raison d'iceux, lesquels arrêts, saisies, jugements
et tout ce qui s'en serait ensuivi, nous avons à cette fin déclaré
et déclarons nuls et de nul effet et valeur.
XC.
Les acquisitions que ceux de ladite religion prétendue réformée
et autres qui ont suivi leur parti auront faites par autorité d'autres
que des feus Rois nos prédécesseurs, pour les immeubles
appartenant à l'Église, n'auront aucun lieu ni effet; ains
[mais] ordonnons, voulons et nous plaît que lesdits ecclésiastiques
rentrent incontinent et sans délai et soient conservés en
la possession et jouissance réelle et actuelle desdits biens ainsi
aliénés, sans être tenus de rendre le prix desdites
ventes, et ce nonobstant lesdits contrats de vendition, lesquels à
cet effet nous avons cassés et révoqués comme nuls,
sans toutefois que lesdits acheteurs puissent avoir aucun recours contre
les chefs par l'autorité desquels lesdits biens auront été
vendus. Et néanmoins, pour les rembourser des deniers par eux véritablement
et sans fraude déboursés, seront expédiées
nos lettres patentes de permission à ceux de la dite religion,
d'imposer et égaler sur eux les sommes à quoi se monteront
lesdites ventes; sans que Iceux acquéreurs puissent prétendre
aucune action pour leurs dommages et intérêts à faute
de jouissance, mais se contenteront du remboursement des deniers par eux
fournis pour le prix desdites acquisitions, précomptant sur icelui
les fruits par eux perçus, en cas que ladite vente se trouvât
faite à vil et injuste prix.
XCI.
Et afin que tant nos justiciers, officiers qu'autres nos sujets soient
clairement et avec toute certitude avertis de nos vouloir et intention
et pour ôter toutes ambiguïtés et doutes qui pourraient
être faits au moyen des précédents édits, pour
la diversité d'iceux nous avons déclaré et déclarons
tous autres précédents édits, articles secrets, lettres,
déclarations, modifications, restrictions, interprétations,
arrêts et registres, tant secrets qu'autres délibérations,
cidevant par nous ou les Rois nos prédécesseurs faites à
nos cours de parlements et ailleurs concernant le fait de ladite religion
et des troubles advenus en notredit royaume, être de nul effet et
valeur, auxquels et aux dérogatoires y contenues, nous avons par
cettui Édit dérogé et dérogeons et dès
à présent, comme pour lors les cassons, révoquons
et annulons, déclarant par exprès que nous voulons que notre
Édit soit ferme et inviolable, gardé et observé,
tant par nosdits justiciers, officiers qu'autres sujets, sans s'arrêter
ni avoir aucun égard à tout ce qui pourrait être contraire
ou dérogeant à icelui.
XCII.
Et pour plus grande assurance de l'entretenement et observation que nous
désirons d'icelui, voulons, ordonnons, et nous plaît que
tous les gouverneurs et lieutenants généraux de nos provinces,
baillis, sénéchaux et autres juges ordinaires des villes
de notredit royaume, incontinent après la réception d'icelui
Édit jurent de le faire garder et observer chacun en leur détroit,
comme aussi les maires, échevins, capitouls, consuls et jurats
des villes, annuels et perpétuels. Enjoignons aussi à nosdits
baillis, sénéchaux ou leurs lieutenants et autres juges
faire jurer aux principaux habitants desdites villes, tant d'une que d'autre
religion, l'entretenement du présent Edit incontinent après
la publication d'icelui. Mettant tous ceux desdites villes en notre protection
et sauvegarde, et les uns à la garde des autres, les chargeant
respectivement et par actes publics de répondre civilement des
contraventions qui seront faites à notredit Édit dans lesdites
par les habitants d'icelles, ou bien représenter et mettre ès
mains de la justice lesdits contrevenants.
Mandons à nos aimés et féaux les gens tenants nos
cours de parlements, chambres des comptes et cours des aides, qu'incontinent
après le présent édit reçu, ils aient, toutes
choses cessantes et sur peine de nullité des actes qu'ils feraient
autrement, à faire pareil serment que dessus et icelui notre Édit
faire publier et enregistrer en nosdites cours selon la forme et teneur
d'icelui, purement et simplement, sans user d'aucunes modifications, restrictions,
déclarations ou registres secrets, ni attendre autre jussion, ni
mandement de nous, et à nos procureurs généraux en
requérir et pour suivre incontinent et sans délai cette
publication.
Si donnons en mandement esdits gens tenant nosdites cours de parlements,
chambres de nos comptes, cours de nos aides, baillis, sénéchaux,
prévôts et autres nos justiciers et officiers qu'il appartiendra
et à leurs lieutenants, qu'ils fassent lire, publier et enregistrer
cestui présent Édit et ordonnance en leurs cours et juridictions
et icelui entretenir, garder et observer de point en point et du contenu
en faire jouir et user pleinement et paisiblement tous ceux qu'il appartiendra
cessant et faisant cesser tous troubles et empêchements au contraire;
car tel est notre plaisir. En témoin de quoi nous avons signé
les présentes de notre propre main et à icelles afin que
ce soit chose ferme et stable à toujours, fait mettre et apposer
notre scel. Donné à Nantes au mois d'avril, l'an de grace
1598, et de nôtre règne le neuvième.
Signé: HENRY.
Et au-dessous: Par le roi, étant dans son Conseil, FORGET.
Et à côté: visa.
Et scellé du grand scel de cire verte, sur lacs de soie rouge
et verte. Lues, publiées et regîstrées, ouï et
ce consentant le procureur général du Roi, en parlement
à Paris le 25 février 1599. Signé: VOYSIN.
Lu, publié et regîstré en la Chambre des Comptes,
ouï et ce consentant le procureur général du Roi, le
dernier jour de mars 1599. Signé: DE LA FONTAINE.
Lu, publié et regîstré, ouï et ce consentant
le procureur général du Roi, à Paris en la Cour des
Aides, le 30 avril 1599. Signé: BERNARD.
ARTICLES PARTICULIERS
I.
L'article sixième dudit Édit touchant la liberté
de conscience et permission à tous les sujets de Sa Majesté
de vivre et demeurer en ce royaume et pays de son obéissance aura
lieu et sera observé selon sa forme et teneur, même pour
les ministres, pédagogues que tous autres et généralement
pour ceux qui sont ou seront de ladite religion, soient régnicoles
ou autres, en se comportant au reste selon qu'il est porté par
ledit Édit.
II.
Ne pourront être ceux de ladite religion contraints de contribuer
aux réparations et constructions des églises, chapelles
et presbytères, ni à l'achat des ornements sacerdotaux,
luminaires, fontes de cloches, pain béni, droit de confréries,
louage de maisons pour la demeure des prêtres et religieux et autres
choses semblables, sinon qu'ils y fussent obligés par fondations,
dotations, ou autres dispositions faites par eux ou leurs auteurs et prédécesseurs.
III.
Ne seront aussi contraints tendre et parer le devant de leurs maisons
aux jours de fêtes ordonnés pour ce faire, mais seulement
souffrir qu'il soit tendu et paré par l'autorité des officiers
des lieux, sans que ceux de ladite religion contribuent aucune chose pour
ce regard.
IV.
Ne seront pareillement tenus ceux de ladite religion de recevoir exhortation
lors ains qu'ils seront malades ou proches de la mort, soit par condamnation
de justice ou autrement, d'autres que de la même religion et pourront
être visités et consolés de leurs ministres sans y
être troublés et quant à ceux qui seront condamnés
par justice, les ministres les visitant en la prison y pourront faire
les prières. Et hors ladite prison les assister et consoler sans
faire prières en public. sinon en lieux où ledit exercice
public leur est permis par ledit Édit.
V.
Sera loisible à ceux de ladite religion, de faire ledit exercice
public d'icelle à Pimpoul (Paimpol) et pour Dieppe, au faubourg
du Paulet et seront lesdits lieux de Pimpoul et du Paulet ordonnés
pour lieux de bailliages. Quant à Sancerre, sera ledit exercice
continué comme il est à présent, sauf à l'établir
dans ladite ville, faisant apparaître par les habitants le consentement
du seigneur du lieu à quoi leur sera pourvu par les commissaires
que Sa Majesté députera pour l'exécution de l'Édit.
Pourvoir aussi lesdits commissaires à ceux de la religion des villes
de Chalons-sur-Marne, Vassy et Vitry-le-François en leur permettant
ledit exercice dans lesdites villes ou faubourgs d'icelles pendant la
guerre s'ils n'en peuvent jouir en sûreté ès lieux
où ils le doivent avoir par ledit Édit. Sera aussi l'exercice
libre et public rétabli dans la ville de Montagnac en Languedoc.
VI.
Sur l'article faisant mention des bailliages, a été déclaré
et accordé ce qui s'ensuit. Premièrement, pour l'établissement
de l'exercice de ladite religion, pour les deux lieux accordés
en chacun bailliage, sénéchaussée et gouvernement,
ceux de ladite religion nommeront deux villes, ès faubourgs desquelles
ledit exercice sera établi par les commissaires que Sa Majesté
députera pour l'exécution de l'Edit. Et où il ne
serait jugé à propos par eux, nommeront ceux de ladite religion
deux ou trois bourgs ou villages proches de ces villes et pour chacunes
d'elles dont les commissaires en choisiront l'un. Et si par hostilité,
contagion ou autre légitime empêchement, il ne peut être
continué dans ces lieux, leur en seront baillés d' autres
pour le temps que durera l'empêchement. Secondement, qu'au gouvernement
de Picardie, ne sera pourvu que de deux villes, aux faubourgs desquelles
ceux de ladite religion pourront avoir l'exercice de celle-ci pour tous
les bailliages, sénéchaussées et gouvernements qui
en dépendent, et où il ne serait jugé à propos
de l'établir dans les villes, leur seront baillés deux bourgs
ou villages commodes. Tiercement, pour la grande étendue de la
sénéchaussée de Provence et bailliage de Viennois,
Sa Majesté accorde en chacun desdits bailliages et sénéchaussées
un troisième lieu dont le choix et nomination se fera comme dessus
pour y établir l'exercice de ladite religion, outre les autres
lieux où il est déjà établi.
VII.
Ce qui est accorde par ledit article pour l'exercice de ladite religion
ès bailliages aura lieu pour les terres qui appartiennent à
la feue reine belle-mère de Sa Majesté, et pour le bailliage
de Beaujolais.
VIII.
Outre les deux lieux accordés pour l'exercice de ladite religion
par les articles particuliers de l'an 1577 ès îles de Marennes
et d'Oléron, leur en seront donnés deux autres à
la commodité desdits habitants, savoir un pour toutes les îles
de Marennes et un autre pour l'île d'Oléron.
IX.
Les provisions octroyées par Sa Majesté pour l'exercice
de ladite religion en la ville de Metz sortiront leur plein et entier
effet.
X.
Sa Majesté veut et entend que l'art. XXVII de son Édit
touchant l'admission de ceux de la religion prétendue réformée
aux offices et dignités soit observé et entretenu selon
sa forme et teneur, nonobstant les édits et accords ci-devant faits
pour la réduction d'aucuns princes, seigneurs, gentilshommes et
villes catholiques en son obéissance, lesquels n'auront lieu au
préjudice de ceux de ladite religion qu'en ce qui regarde l'exercice
d'icelle. Et sera ledit exercice réglé selon et ainsi qu'il
est porté par les articles qui s'ensuivent, suivant lesquels seront
dressées les instructions des commissaires que Sa Majesté
députera pour l'exécution de son Édit, selon qu'il
est porté par icelui.
XI.
Suivant l'Édit fait par Sa Majesté pour la réduction
du sieur duc de Guise, l'exercice de la religion prétendue réformée
ne pourra être fait ni établi dans les villes et faubourgs
de Rheims [Reims], Recroy [Rocroi], Saint-Pizié [Dizier], Guyse
[Guise], Joinville, et Montcomet ès Ardennes.
XII.
Ne pourra aussi être fait ès autres lieux ès environs
desdites villes et places défendues par l'Édit de l'an 1577.
XIII.
Et pour ôter toute ambiguïté qui pourrait naître
sur le mot "ès environs", déclare Sa Majesté
avoir entendu parler des lieux qui sont dans la banlieue desdites villes,
esquels lieux l'exercice de ladite religion ne pourra être établi,
sinon qu'il y fût permis par l'Édit de 1577.
XIV.
Et d'autant que par icelui ledit exercice était permis généralement
ès fiefs possédés par ceux de ladite religion sans
que ladite banlieue en fût exceptée, déclare Sa Majesté
que la même permission aura lieu, même ès fiefs qui
seront dedans icelle tenus par ceux de ladite religion, ainsi qu'il est
porté par son Édit donné à Nantes.
XV.
Suivant aussi l'édit fait pour la réduction du sieur maréchal
de La Châtre, en chacun des bailliages d'Orléans et Bourges
ne sera ordonné qu'un lieu de bailliage pour l'exercice de ladite
religion, lequel néanmoins pourra être continué ès
lieux où il leur est permis de le continuer par l'édit de
Nantes.
XVI.
La concession de prêcher ès fiefs, aura pareillement lieu
dans lesdits bailliages en la forme portée par ledit édit
de Nantes.
XVII.
Sera pareillement observé l'édit fait pour la réduction
du sieur maréchal de Bois-Dauphin et ne pourra ledit exercice être
fait ès villes, faubourgs et places amenées par lui au service
de Sa Majesté, et quant à leurs environs ou banlieue, y
sera l'édit de 1577 observé, même ès maisons
de fief, ainsi qu'il est porté par l'édit de Nantes.
XVIII.
Ne se fera aucun exercice de ladite religion ès villes, faubourgs
et château de Morlaix, suivant l'édit fait sur la réduction
de ladite ville et sera l'édit de 1577 observé au ressort
de celle-ci, même pour les fiefs, selon l'édit de Nantes.
XIX.
En conséquence de l'édit pour la réduction de Quimper-Corentin,
ne sera fait aucun exercice de ladite religion en tout l'évêché
de Cornouaille.
XX.
Suivant aussi l'édit fait pour la réduction de Beauvais,
l'exercice de ladite religion ne pourra être fait en la ville de
Beauvais ni trois lieues à la ronde. Pourra néanmoins être
fait et établi au surplus de l'étendue du bailliage aux
lieux permis par l'édit de 1577, même dans les maisons de
fiefs ainsi qu'il est porté par l'édit de Nantes.
XXI.
Et d'autant que l'édit fait pour la réduction du feu sieur
amiral de Villars n'est que provisionnel et jusqu'à ce que par
le Roi en eût autrement été ordonné, Sa Majesté
veut et entend que nonobstant celui-ci, son édit de Nantes ait
lieu pour les villes et ressorts amenés à son obéissance
par le sieur amiral comme pour les autres lieux de son royaume.
XXII.
En suite de l'édit pour la réduction du sieur duc de Joyeuse,
l'exercice de ladite religion ne pourra être fait en la ville de
Toulouse, faubourgs d'icelle et quatre lieues à la ronde, ni plus
près que sont les villes de Villemur, Carman (Caraman) et l'Isle-en-Jourdan.
XXIII.
Ne pourra aussi être remis dans les villes d'Allet (Alet), Firac
(Fiac), Auriac, et Montesquieu à la charge toutefois que si auxdites
villes aucuns de ladite religion faisaient instance d'avoir un lieu pour
l'exercice d'icelle, leur sera baillé par les commissaires que
Sa Majesté députera pour l'exécution de son édit
ou par les officiers des lieux assignés pour chacune de ces villes
lieu commode et de sûr accès qui ne sera éloigné
de ces villes de plus d'une lieue.
XXIV.
Pourra l'exercice être établi selon et ainsi qu'il est porté
par ledit édit de Nantes au ressort de la cour de parlement de
Toulouse, excepté toutefois ès bailliages, sénéchaussées
et leurs ressorts dont le siège présidial a été
ramené à l'obéissance du Roi par ledit sieur duc
de Joyeuse, auxquels l'édit de 1577 aura lieu, entend toutefois
Sadite Majesté que ledit exercice puisse être continué
ès endroits desdits bailliages et sénéchaussées
où il était du temps de ladite réduction et que la
concession d'icelui exercice ès maisons de fiefs ait lieu dans
iceux bailliages et sénéchaussées selon qu'il est
porté par ledit édit de Nantes.
XXV.
L'édit fait pour la réduction de la ville de Dijon sera
observé, et suivant icelui n'y aura autre exercice de religion
que de la catholique, apostolique et romaine en ladite ville et faubourgs
d'icelle ni quatre lieues à la ronde.
XXVI.
Sera pareillement observé l'édit fait pour la réduction
du sieur duc de Mayenne, suivant lequel ne pourra l'exercice de ladite
religion prétendue réformée être fait ès
villes de Châlons (Côte-d'Or), Seurre et Soissons (Aisne),
bailliage dudit Châlons et deux lieues ès environs de Soissons
durant le temps de six ans à commencer au mois de janvier, an 1596;
passé lequel temps y sera l’édit de Nantes observé
comme aux autres endroits de ce royaume.
XXVII.
Sera permis à ceux de ladite religion, de quelque qualité
qu'ils soient, d'habiter, aller et venir librement en la ville de Lyon
et autres villes et places du gouvernement de Lyonnais, nonobstant toutes
défenses faites au contraire par les syndics et échevins
de la ville de Lyon et confirmées par Sa Majesté.
XXVIII.
Ne sera ordonné qu'un lieu de bailliage pour l'exercice de ladite
religion en toute la sénéchaussée de Poitiers, outre
ceux où il est à présent établi, et quant
aux fiefs sera suivi l'édit de Nantes. Sera aussi l'exercice continué
dans la ville de Chauvigny et ne pourra ledit exercice être rétabli
dans les villes d'Agen et Périgueux, encore que par l'édit
de 1577 il y pût être.
XIX.
N'y aura que deux lieux de bailliage pour l'exercice de ladite religion
en tout le gouvernement de Picardie comme il a été dit ci-dessus,
et ne pourront les deux lieux être donnés dans le ressort
du bailliage et gouvernement réservés par les édits
faits sur la réduction d'Amiens, Péronne, Abbeville. Pourra
toutefois ledit exercice être fait ès maisons de fiefs par
tout le gouvernement de Picardie selon et ainsi qu'il est porté
par ledit édit de Nantes.
XXX.
Ne sera fait aucun exercice de ladite religion en la ville et faubourgs
de Sens et ne sera ordonné qu'un lieu de bailliage pour ledit exercice
en tout le ressort du bailliage, sans préjudice toutefois de la
permission accordée pour les maisons de fiefs, laquelle aura lieu
selon l'édit de Nantes.
XXXI.
Ne pourra semblablement être fait l'exercice en la ville et faubourgs
de Nantes et ne sera ordonné aucun lieu de bailliage pour ledit
exercice à trois lieues à la ronde de ladite ville pourra
toutefois être fait dans les maisons de fiefs, suivant icelui édit
de Nantes.
XXXII.
Veut et entend Sa Majesté que sondit édit de Nantes soit
observé dès à présent en ce qui concerne l'exercice
de ladite religion ès lieux où par les édits et accords
faits pour la réduction d'aucuns princes, seigneurs, gentilshommes
et villes catholiques il était inhibé, par provision tant
seulement et jusqu'à ce qu'autrement fût ordonné.
Et quant à ceux où ladite prohibition est limitée
à certain temps, passé ledit temps, elle n'aura plus de
lieu.
XXXIII.
Sera baillé à ceux de ladite religion un lieu pour la ville,
prévôté et vicomté de Paris, à cinq
lieues pour le plus de ladite ville, auquel ils pourront faire l'exercice
public d'icelle.
XXXIV.
En tous les lieux où l'exercice de ladite religion se fera publiquement,
on pourra assembler le peuple, même à son de cloche, et faire
tous actes et fonctions appartenant tant à l'exercice de ladite
religion qu'au règlement de la discipline comme tenir consistoires,
colloques et synodes provinciaux et nationaux par la permission de Sa
Majesté.
XXXV.
Les ministres, anciens et diacres de ladite religion ne pourront être
contraints de répondre en justice en qualité de témoins
pour les choses qui auront été révélées
en leurs consistoires lorsqu'il s'agit de censures, sinon que ce fût
pour chose concernant la personne du Roi ou la conservation de son État.
XXXVI.
Sera loisible à ceux de ladite religion qui demeurent aux champs
d'aller à l'exercice d'icelle ès villes et faubourgs et
autres lieux où il sera publiquement établi.
XXXVII.
Ne pourront ceux de ladite religion tenir écoles publiques, sinon
ès villes et lieux où l'exercice public d'icelle leur est
permis, et les provisions qui leur ont été ci-devant accordées
pour l'érection et entretenement des collèges seront vérifiées
[au cas] où besoin sera et sortiront leur plein et entier effet.
XXXVIII.
Sera loisible aux pères faisant profession de ladite religion
de pourvoir leurs enfants de tels éducateurs que bon leur semblera
et en substituer un ou plusieurs par testament, codicille ou autre déclaration
passée par devant notaires, ou écrite et signée de
leurs mains, demeurant les lois reçues en ce royaume, ordonnances
et coutumes des lieux en leur force et vertu, pour les dations et provisions
de tuteurs et curateurs.
XXXIX.
Pour le regard des mariages des prêtres et personnes religieuses
qui ont été ci-devant contractés, Sadite Majesté
ne veut ni entend, pour plusieurs bonnes considérations, qu'ils
en soient recherchés ni molestés; et sera sur ce imposé
silence à ses procureurs généraux et autres officiers
d'icelle. Déclare néanmoins Sa Majesté qu'elle entend
que les enfants issus desdits mariages pourront succéder seulement
ès meubles, acquêts et conquêts immeubles de leurs
pères et mères, et au défaut desdits enfants, les
parents plus proches et aptes à succéder, et les testaments,
donations et autres dispositions faites ou à faire par personnes
de ladite qualité, desdits biens meubles, acquêts et conquêts
immeubles, sont déclarées bonnes et valables. Ne veut toutefois
Sadite Majesté que les religieux et religieuses profés puissent
venir à aucune succession directe ni collatérale; mais seulement
pourront prendre les biens qui leur ont été ou seront laissés
par testament, donations, ou autres dispositions, excepté toutefois
ceux desdites successions directes et collatérales, et quant à
ceux qui auront fait profession avant l'âge porté par les
ordonnances d'Orléans et Blois, sera suivie et observée
en ce qui regarde lesdites successions, la teneur desdites ordonnances,
chacune pour le temps qu'elles ont eu lieu.
XL.
Sa Majesté ne veut aussi que ceux de ladite religion qui auront
ci-devant contracté ou contracteront ci-après mariages au
tiers et quart degré en puissent être molestés, ni
la validité desdits contrats révoquée en doute, ni
pareillement la succession ôtée ni querellée aux enfants
nés ou à naître d'iceux, et quant aux mariages qui
pourraient être contractés en second degré ou de second
au tiers entre ceux de ladite religion, se retirant devers Sa Majesté
ceux qui seront de ladite qualité et auront contracté mariage
en tel degré, leur seront baillées telles provisions qui
leur seront nécessaires afin qu'ils n'en soient recherchés
ni molestés, ni la succession querellée ni débattue
à leurs enfants.
XLI.
Pour juger de la validité des mariages faits et contractés
par ceux de ladite religion et décider s'ils sont licites, si celui
de ladite religion est défendeur, en ce cas le juge royal connaîtra
du fait dudit mariage, et où il serait demandeur et le défendeur
catholique, la connaissance en appartiendra à l'official et juges
ecclésiastiques, et si les deux parties sont de ladite religion,
la connaissance en appartiendra aux juges royaux, voulant Sadite Majesté
que, pour le regard de ces mariages et différends qui surviendront
pour iceux, les juges ecclésiastiques et royaux, ensemble les chambres
établies par son Édit, en connaissent respectivement.
XLII.
Les donations et légats [legs] faits et à faire, soit par
disposition de dernière volonté à cause de mort ou
entre vifs pour l'entretenement des ministres, docteurs, écoliers
et pauvres de ladite religion prétendue réformée
et autres causes pies, seront valables et sortiront leur plein et entier
effet, nonobstant tous jugements, arrêts et autres choses à
ce contraires, sans préjudice toutefois des droits de Sa Majesté
et d'autrui, en cas que lesdits légats et donations tombent en
main morte; et pourront toutes actions et poursuites nécessaires
pour la jouissance desdits légats, causes pies et autres droits,
tant en jugement que dehors, être faites par procureur sous le nom
du corps et communauté de ceux de ladite religion qui y aura intérêt,
et s'il se trouve qu'il ait été ci-devant disposé
desdites donations et légats, autrement qu'il n'est porté
par ledit article, ne s'en pourra prétendre aucune restitution
que ce qui se trouvera en nature.
XLIII.
Permet Sadite Majesté à ceux de ladite religion eux assembler
par devant le juge royal et par son autorité égaler et lever
sur eux telle somme de deniers qu'il sera arbitré être nécessaire
pour être employés pour les frais de leurs synodes et entretenements
de ceux qui ont charges pour l'exercice de leurdite religion, dont on
baillera l'état audit juge royal pour icelui garder, la copie duquel
état sera envoyée par ledit juge royal de six en six mois
à Sadite Majesté ou à son chancelier, et seront les
taxes et impositions desdits deniers exécutoires, nonobstant oppositions
ou appellations quelconques.
XLIV.
Les ministres de ladite religion seront exempts des gardes et rondes,
et logis de gens de guerre et autres assiettes et cueillettes de tailles,
ensemble des tutelles, curatelles et commissions pour la garde des biens
saisis par autorité de justice.
XLV.
En cas que les officiers de Sa Majesté ne pourvoient de lieux
commodes pour les sépultures de ceux de ladite religion dans le
temps porté par l'Édit, après leur réquisition
et qu'il soit usé de longueur et remise, pour ce regard, sera loisible
à ceux de ladite religion d'enterrer les morts dans les cimetières
des catholiques aux villes et lieux où ils sont en possession de
le faire jusqu'à ce qui leur en soit pourvu. Quant aux enterrements
de ceux de ladite religion faits par ci-devant aux cimetières des
catholiques en quelque lieu ou ville que ce soit, n'entend Sa Majesté
qu'il en soit fait aucune recherche, innovation et poursuite, et sera
enjoint à ses officiers d'y tenir la main. Pour le regard de la
ville de Paris, outre les deux cimetières que ceux de ladite religion
y ont présentement, à savoir celui de la Trinité
et celui de Saint-Germain, leur sera baillé un troisième
lieu commode pour desdites sépultures aux faubourgs Saint-Honoré
ou Saint-Denis.
XLVI.
Les présidents et conseillers catholiques qui serviront en la
chambre ordonnée au parlement de Paris seront choisis par Sa Majesté
sur le tableau des officiers dudit parlement et y seront employés
personnages équitables, paisibles et modérés.
XLVII.
Les conseillers de ladite religion prétendue réformée
qui serviront en la chambre assisteront si bon leur semble ès procès
qui se videront par commissaires et y auront voix délibérative,
sans qu'ils aient part aux deniers consignés, sinon lorsque par
l'ordre et prérogative de leur réception ils y devront assister.
XLVIII.
Le plus ancien président des chambres mi-parties présidera
en l'audience, et en son absence le second, et se fera la distribution
des procès par les deux présidents conjointement ou alternativement,
par mois ou par semaine.
XLVIIII.
Advenant vacation des offices dont ceux de ladite religion sont ou seront
pourvus auxdites chambres de l'Édit, y sera pourvu de personnes
capables qui auront attestation du synode ou colloque dont ils seront
qu'ils sont de ladite religion et gens de bien.
L.
L'abolition accordée à ceux de ladite religion prétendue
réformée par le LXXIIIIe article dudit Édit aura
lieu pour la prise de tous deniers royaux, soit par ruptures de coffres
ou autrement, même pour le regard de ceux qui se levaient sur la
rivière de Charente quoiqu'ils eussent été affectés
et assignés à des particuliers.
LI.
L'article 46 des articles secrets faits en l'année 1577 touchant
la ville et archevêché d'Avignon et comté de Venise
[Venaissin], ensemble le traité fait à Nîmes, seront
observés, selon leur forme et teneur, et ne seront aucunes lettres
de marque, en vertu desdits articles et traités, données
que par lettres patentes du Roi scellées de son grand sceau. Pourront
néanmoins ceux qui les voudront obtenir se pourvoir en vertu du
présent article, et sans autre commission, par devant les juges
royaux, lesquels informeront des contraventions, déni de justice
et iniquité des jugements proposés par ceux qui désireront
obtenir lesdites lettres et les enverront avec leur avis clos et scellé
à Sa Majesté, pour en être ordonné comme elle
verra être à faire par raison.
LII.
Sa Majesté accorde et veut que maître Nicolas Grimoult soit
rétabli et maintenu au titre et possession des offices de lieutenant
général civil ancien et de lieutenant général
criminel au bailliage d'Alençon, nonobstant la résignation
par lui faite à maître Jean Marguerit, réception d'
icelui et la provision obtenue par maître Guillaume Bernard de l'office
de lieutenant général, civil et criminel au siège
d'Exmes, et les arrêts donnés contre ledit Marguerit résignateur
durant les troubles au Conseil privé, des années 1586, 1587
et 1588, par lesquels maître Nicolas Barbier est maintenu dans les
droits et prérogatives de lieutenant général ancien
audit bailliage et Bernard à l'office de lieutenant à Exmes,
lesquels Sa Majesté a cassés et annulés, et tous
autres à ce contraires. Et outre Sadite Majesté, pour certaines
bonnes considérations, a accordé et ordonné que Grimoult
remboursera dedans trois mois Barbier de la finance qu'il a fournie aux
parties casuelles pour l'office de lieutenant général, civil
et criminel en la vicomté d'Alençon et de cinquante écus
pour les frais, commettant à cette fin le bailli du Perche ou son
lieutenant à Mortagne. Et le remboursement fait, ou bien que Barbier
soit refusant ou dilayant [retardent] de le recevoir. Sadite Majesté
a défendu audit Barbier, comme aussi audit Bernard, après
la signification du présent article, de plus s'ingérer en
l'exercice desdits offices, à peine de crime de faux, et envoie
icelui Grimoult en la jouissance d'iceux offices, et droits y appartenant,
et en ce faisant les procès qui étaient pendants au Conseil
privé de Sa Majesté entre lesdits Grimoult, Barbier et Bernard
demeureront terminés et assoupis, défendant Sadite Majesté
aux parlements et tous autres d'en prendre connaissance et auxdites parties
d'en faire poursuite. En outre Sadite Majesté s'est chargée
de rembourser ledit Bernard de mille écus fournis aux parties casuelles
pour icelui office et de soixante écus pour le marc d' or et frais,
ayant pour cet effet présentement ordonné bonne et suffisante
assignation, le recouvrement de laquelle se fera à la diligence
et frais dudit Grimoult.
LIII.
Sadite Majesté écrira à ses ambassadeurs de faire
instance et poursuite pour tous ses sujets, même pour ceux de ladite
religion prétendue réformée, à ce qu'ils ne
soient recherchés en leurs consciences, ni sujets à l'Inquisition,
allant, venant, séjournant, négociant et trafiquant par
tous les pays étrangers, alliés et confédérés
de cette Couronne, pourvu qu'ils n'offensent la police des pays où
ils seront.
LIV.
Les excès advenus en la personne d'Armand Courtines dans la ville
de Millau en l'an 1587 et de Jean Renes et Pierre Seigneuret, ensemble
les procédures faites contre eux par les consuls dudit Millau,
demeureront abolies et assoupies par le bénéfice de l'Édit
sans qu'il soit loisible à leurs veuves et héritiers, ni
aux procureurs généraux de Sa Majesté, leurs substituts
ou autres personnes quelconques, d'en faire mention, recherche, ni poursuite;
nonobstant et sans avoir égard à l'arrêt donné
en la chambre de Castres le dixième jour de mars dernier, lequel
demeurera nul et sans effet, ensemble toutes informations et procédures
faites de part et d' autre.
LV.
Tous ceux de ladite religion prétendue réformée
qui sont demeurés titulaires des bénéfices seront
tenus les résigner dans les six mois à personnes catholiques
et ceux qui ont promesse de pensions sur lesdits bénéfices
en seront payés et le paiement desdites pensions contraints leur
payer leurs arréages échus daurant les troubles.
LVI.
Toutes poursuites, procédures, sentences, jugements et arrêts
donnés tant contre le feu sieur de La Noue que contre le sieur
Odet de La Noue, son fils, depuis leurs détentions et prisons en
Flandre advenues ès mois de mai 1580 et de novembre 1584 et pendant
leur continuelle occupation au fait des guerres et service de Sa Majesté,
demeureront cassés et annulés et tout ce qui est ensuivi
en conséquence d' iceux, et seront lesdits de La Noue reçus
en leurs défenses et remis en tel état qu'ils étaient
auparavant lesdits jugements et arrêts, sans qu'ils soient tenus
refonder les dépens, ni consigner les amendes, si aucunes iès
avaient encourues, ni qu'on puisse alléguer contre eux aucune péremption
d'instance ou prescription pendant le temps.
Ne veut Sa Majesté qu'il soit fait aucune recherche de la perception
des impositions qui ont été levées à Royan,
en vertu du contrat fait avec le sieur de Candelay et autres faits en
continuation d'iceux, validant et approuvant ledit contrat pour le temps
qu'il a eu lieu en tout son contenu, jusqu'au dix-huitième jour
de mai prochain.
Fait par le Roi étant en son Conseil, à Nantes, le deuxième
jour de mai mille cinq cent quatre-vingt dix-huit.
Signé: HENRY.
Et au-dessous: Par le Roi, étant dans son Conseil, FORGET.
Et scellé du grand scel de cire verte, sur lacs de soie rouge
et verte.
Lu, publié et regîstré, ouï et ce consentant
le procureur général du Roi, le 25 février 1599.
Signé: VOYSIN.
Lu, publié et regîstré en la Chambre des Comptes,
ouï et ce consentant le procureur général du Roi, le
dernier jour de mars 1599.
Signé: DE LA FONTAINE.
Lu, publié et regîstré à Paris en la Cour
des Aides, le 30 avril 1599.
Signé: BERNARD.
PREMIER BREVET
Aujourd'hui troisième jour d'avril 1598, le Roi étant à
Nantes, voulant gratifier ses sujets de la religion prétendue réformée
et leur aider à subvenir à plusieurs grandes dépenses
qu'ils ont à supporter, a ordonné et ordonne qu'à
l'avenir, à commencer du premier jour du présent mois, sera
mis entre les mains de M. de Vierse [Viçose], commis par Sa Majesté
à cet effet, par les trésoriers de son Épargne, chacun
en son année, des rescriptions pour la somme de quarantecinq mille
écus, pour employer à certains affaires secrètes
qui les concernent que Sa Majesté ne veut être spécifiées,
ni déclarées, laquelle somme de quarante-cinq mille écus
sera assignée sur les recettes générales qui ensuivent:
à savoir, Paris, six mille écus; Rouen, six mille écus;
Caen, trois mille écus; Orléans, quatre mille écus;
Tours, quatre mille écus; Poitiers, huit mille écus; Limoges,
six mille écus; Bordeaux, huit mille écus. Le tout revenant
ensemble à la somme de quarante-cinq mille écus; payable
par les quatre quartiers de l'année des premiers et plus clairs
deniers desdites recettes générales, sans qu'il en puisse
être retranché ni reculé aucune chose pour les non-valeurs
ou autrement. De laquelle somme de quarante-cinq mille écus fera
fournir acquit de comptant qui sera mis dans les mains des trésoriers
de sondit Epargne pour leur servir d'acquit en baillant lesdites rescriptions
entières pour la somme de quarante-cinq mille écus sur lesdites
généralités au commencement de chaque année.
Et [au cas] où pour la commodité des susdits seront requis
faire payer en recettes particulières établies, partie desdites
assignations, sera mandé aux trésoriers généraux
de France et receveurs généraux desdites généralités
de le faire en déduction desdites rescriptions desdits trésoriers
de l'Epargne, lesquelles seront après délivrées par
ledit sieur de Vierse [Viçose], à ceux qui lui seront nommés
par ceux de ladite religion au commencement de l'année, pour faire
la recette et dépense des deniers qui devront être reçus
en vertu d'icelles dont ils seront tenus rapporter au sieur de Vierse
[Viçose] à la fin de l'année un état au vrai
avec les quittances des parties prenantes pour informer Sa Majesté
de l'emploi desdits deniers, sans que le sieur de Vierse [Viçose],
ni ceux qui seront mis par ceux de ladite religion, soient tenus d'en
rendre compte en aucune chambre, dont et de tout ce qui en dépend
Sadite Majesté a commandé toutes lettres et dépêches
nécessaires leur être expédiées en vertu du
présent brevet, qu'elle a fait signer de sa main et contresigner
par nous Conseiller en son Conseil d'Etat et secrétaire de ses
commandements.
Signé, HENRY.
Et plus bas, DE NEUFVILLE.
SECOND BREVET
Aujourd'hui dernier jour d'avril 1598, le Roi étant à Nantes,
voulant donner tout le contentement qu'il lui est possible à ses
sujets de la religion prétendue réformée, sur les
demandes et requêtes qui lui ont été faites de leur
part pour ce qu'ils ont estimé leur être nécessaire,
tant pour la liberté de leurs consciences que pour l'assurance
de leurs personnes, fortunes et biens. Et pour l'assurance que Sa Majesté
a de leur fidélité et sincère affection à
son service, avec plusieurs autres considérations importantes au
bien et au repos de cet État, Sadite Majesté, outre ce qui
est contenu en l'Édit qu'elle a nouvellement résolu et qui
doit être publié pour le règlement de ce qui les concerne,
leur a accordé et promis que toutes les places, villes et châteaux
qu'ils tenaient jusqu'à la fin du mois d'août dernier esquelles
il y aura garnisons, par l'état qui en sera dressé et signé
par Sa Majesté, demeureront en leur garde sous l'autorité
et obéissance de Sadite Majesté par l'espace de huit ans,
à compter du jour de la publication dudit Édit. Et pour
les autres qu'ils tiennent où il n'y aura point de garnisons, n'y
sera point altéré ni innové. N'entend toutefois Sadite
Majesté que les villes et châteaux de Vendôme et Pontorson
soient compris au nombre de ces places laissées en garde à
ceux de ladite religion. N'entend aussi comprendre au nombre la ville,
château et citadelle d'Aubenas, de laquelle elle veut disposer à
sa volonté sans que si c'est entre les mains d'un de ladite religion,
que cela fasse conséquence qu'elle soit après affectée
à un autre de ladite religion, comme les autres villes qui leur
sont accordées. Et quant à Chauvigny, elle sera rendue à
l'évêque de Poitiers, seigneur du lieu, et les nouvelles
fortifications faites en icelle rasées et démolies. Et pour
l'entretenement des garnisons qui devront être entretenues esdits
villes, places et châteaux, leur a Sa Majesté accordé
jusqu'à la somme de cent quatre-vingt mille écus sans y
comprendre celles de la province de Dauphiné auxquelles sera pourvu
d'ailleurs de ladite somme de cent quatre-vingt mille écus par
an; leur promet et assure en faire bailler les assignations bonnes et
valables sur les plus clairs deniers où seront établies
ces garnisons. Et [au cas] où elles n'y suffiraient et qu'il n'y
eût en icelles assez de fonds, leur sera parfourni le surplus sur
les autres recettes plus prochaines, sans que les deniers puissent être
divertis desdites recettes que ladite somme n' ait été entièrement
fournie et acquittée. Leur a en outre Sa Majesté promis
et accordé que lorsqu'elle fera et arrêtera l'état
desdites garnisons, elle appellera auprès d'elle aucuns de ceux
de ladite religion pour en prendre leur avis et entendre sur ce leurs
remontrances, pour après en ordonner, ce qu'elle fera toujours
le plus à leur contentement que faire se pourra. Et si, pendant
le temps desdites huit années, il y a occasion de faire quelque
changement sur ledit état, soit que cela procède du jugement
qu'en fera Sadite Majesté ou que ce soit à leur réquisition,
elle en usera de même qu'à le résoudre pour la première
fois. Et quant aux garnisons de Dauphiné, Sa Majesté, dressant
état d'icelles, prendra sur ce l'avis du sieur de Lesdiguières.
Et advenant vacation d'aucuns gouverneurs et capitaines desdites places,
Sadite Majesté leur promet aussi et accorde qu'elle n'en pourvoira
aucun qui ne soit de ladite religion prétendue réformée
et qu'il n'aît attestation du colloque où il sera résident,
qu'il soit de ladite religion, et homme de bien. Se contentera néanmoins
que celui qui en devra être pourvu sur le brevet qui lui en aura
été expédié soit tenu, auparavant que d'en
obtenir la provision, de rapporter l'attestation du colloque d'où
il sera, laquelle aussi ceux du colloque seront tenus de lui bailler promptement
sans le tenir en aucune longueur; ou, en cas de refus, feront entendre
à Sa Majesté les causes d'iceluil. Et ce terme desdites
huit années expiré, combien que Sadite Majesté soit
quitte de sa promesse pour le regard desdites villes, et eux obligés
de les lui remettre, toutefois elle leur a encore accordé et promis
que si esdites villes elle continue après ledit temps y tenir garnisons
ou y laisser un gouverneur pour commander, qu'elle n'en dépossédera
point celui qui s'en trouvera pourvu pour y en mettre un autre. Comme
pareillement déclare que son intention est tant pendant ces huit
années qu'après icelles, de gratifier ceux de ladite religion
et leur faire part des charges, gouvernements et autres honneurs qu'elle
aura à distribuer et départir indifféremment et sans
aucune exception selon la qualité et mérite des personnes,
comme à ses autres sujets catholiques; sans toutefois que les villes
et places qui leur pourront ci-après être commises pour y
commander, autres que celles qu'ils ont à présent, puissent
tirer à conséquence d'être ci-après particulièrement
affectées à ceux de ladite religion. Outre ce, Sa Majesté
leur a accordé que ceux qui ont été commis par ceux
de ladite religion à la garde des magasins, munitions, poudres
et canons d' icelles vil]es et ceux qui leur seront laissés en
garde seront continués esdites charges en prenant commission du
grand maître de l'artillerie et commissaire général
des vivres. Lesquelles lettres seront expédiées gratuitement,
mettant entre leurs mains les états signés en bonne et due
forme desdits magasins, munitions, poudres et canons, sans que pour raison
desdites commissions, ils puissent prétendre aucunes immunités
ou privilège. Seront néanmoins employés sur l'état
qui sera fait desdites garnisons, pour être payés de leurs
gages sur les sommes ci-dessus accordées par Sa Majesté,
pour l'entretien de leurs garnisons, sans que les autres finances de Sa
Majesté en soient aucunement chargées. Et d'autant que ceux
de ladite religion ont supplié Sa Majesté de leur vouloir
faire entendre ce qu'il lui a plu d'ordonner pour l'exercice de celle-ci
en la ville de Metz, d'autant que cela n'est assez donné clairement
à entendre et compris en son Édit et Articles secrets, déclare
Sa Majesté qu'elle a fait expédier lettres patentes par
lesquelles il est porté que le temple ci-devant bâti dans
ladite ville par les habitants d'icelle leur sera rendu pour en lever
les matériaux, ou autrement en disposer comme ils verront être
à faire, sans toutefois qu'il leur soit loisible d'y prêcher
ni faire aucun exercice de ladite religion; et néanmoins leur sera
pourvu d'un lieu commode dans l'enclos de la ville où ils pourront
faire ledit exercice public sans qu'il soit nécessaire de l'exprimer
par son édit. Accorde aussi Sa Majesté que, nonobstant la
défense faite de l'exercice de ladite religion à la Cour
et suite d'icelle, les ducs, pairs de France, officiers de la couronne,
marquis, comtes, gouverneurs et lieutenants généraux, maréchaux
de camp et capitaines de gardes de Sadite Majesté qui seront à
sa suite ne seront recherchés de ce qu'ils feront à leur
logis, pourvu que ce soit en leur famille particulière tant seulement
à portes closes et sans psalmodier à haute voix, ni rien
faire qui puisse donner à connaître que ce soit exercice
public de ladite religion, et si Sadite Majesté demeure plus de
trois jours dans les villes et lieux où l'exercice est permis,
pourra cet exercice après ledit temps y être continué
comme il était avant son arrivée. Déclare Sa Majesté
qu'attendu l'état présent de ses affaires, elle n'a pu comprendre
pour maintenant ses pays delà les monts, Bresse et Barcellonne
[Barcellonnette], en la permission par elle accordée de l'exercice
de ladite religion prétendue réformée. Promet néanmoins
Sa Majesté que lorsque sesdits pays seront en son obéissance,
elle traitera ses sujets d'iceux pour le regard de la religion et autres
points accordés par son Édit comme ses autres sujets, nonobstant
ce qui est porté par ledit Édit, et cependant seront maintenus
en l' état où ils sont à présent. Accorde
Sa Majesté que ceux de ladite religion prétendue réformée
qui doivent être pourvus des offices de présidents et conseillers
créés pour servir aux chambres ordonnées de nouveau
par son Edit seront pourvus lesdits offices gratuitement, et sans finance
pour la première fois, sur l'état que sera présenté
à Sa Majesté par les députés de l'assemblée
de Châtellerault, comme aussi les substituts des procureurs et avocats
généraux érigés par le même édit
en la chambre de Bordeaux, et avenant incorporation de ladite chambre
de Bordeaux et de celle de Toulouse auxdits parlements, lesdits substituts
seront pourvus d'offices de conseillers en iceux aussi gratuitement. Sa
Majesté fera aussi pourvoir messire François Pitou de l'office
de substitut et procureur général en la cour de parlement
de Paris, et à ces fins sera faite érection de nouveau dudit
office et après le décès dudit Pitou en sera pourvu
un de ladite religion prétendue réformée. Et advenant
vacation par mort de deux offices de maîtres des requêtes
de l'Hôtel du roi, les premiers qui vaqueront, y sera pourvu par
Sa Majesté de personnes de ladite religion prétendue réformée
que Sa Majesté verra être propres et capables pour le bien
de son service, et pour le prix de la taxe des parties casuelles. Et cependant
sera ordonné qu'en chacun quartier il y ait deux maîtres
des requêtes qui seront chargés de rapporter les requêtes
de ceux de ladite religion. Permet en outre Sa Majesté aux députés
de ladite religion assemblés en ladite ville de Châtellerault
de demeurer ensemble au nombre de dix en la ville de Saumur pour la poursuite
de l'exécution de son Édit, jusqu'à ce que son Édit
soit vérifié en sa cour de parlement de Paris, nonobstant
qu'il leur soit enjoint par ledit Édit de se séparer promptement,
sans toutefois qu'ils puissent faire au nom de ladite assemblée
aucunes nouvelles demandes ni s'entremettre que de la sollicitation de
l'exécution, députation, et acheminement des commissaires
qui seront pour ce ordonnés. Et de tout ce que dessus, leur a Sa
Majesté donné sa foi et parole par le présent brevet,
qu'elle a voulu signer de sa propre main et contresigner par nous ses
secrétaires d'État; voulant icelui brevet leur valoir et
avoir le même effet que si le contenu en icelui était compris
en un édit vérifié en ses cours de parlement, s'étant
ceux de ladite religion contentés, pour s'accommoder à ce
qui est de son service et à l'état de ses affaires, de ne
la presser pas de mettre cette ordonnance en autre forme plus authentique,
prenant cette confiance en la parole et bonté de Sa Majesté,
qu'elle les en fera jouir entièrement. Ayant à cette fin
commandé que toutes les expéditions et dépêches
qui seront nécessaires pour l'exécution de ce que dessus
leur en soient expédiées.
Ainsi signé, HENRY.
Et plus bas, FORGET.
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